lundi 28 novembre 2005

Au café du commerce...

...on évoque toutes sortes de sujets, sur lesquels on n'hésite pas à émettre des opinions définitives.


Aujourd'hui : pourquoi ce sont les fridolins qui ont été nazis, et pas nous.

Malgré la troublante insistance des intellectuels allemands depuis trois siècles à traiter la majorité de leurs compatriotes de parfaits abrutis, il me semble que la bêtise teutonne ne doit pas être tous comptes faits bien plus grande que la connerie hexagonale. Freud (non, je n'ai pas lu Freud, je ne me dédis pas si vite, c'est Muray qui le cite) a écrit des Allemands que c'était un peuple "mal baptisé", en ce sens qu'ils n'ont jamais été vraiment catholiques, ce qui expliquerait notamment que la Réforme soit née là-bas. Admettons. Quoi qu'il en soit, il me semble évident que si les Allemands ont si longtemps cherché "l'âme allemande", c'est qu'ils ne la trouvaient pas, ceci entre autres parce qu'ils leur manquaient l'issue du catholicisme latin. Je veux dire par là que pour qui est troublé de ce que le catholicisme soit une religion venue d'Orient - des Juifs en l'occurrence, mais dans l'imaginaire collectif pas seulement : utilisons comme Paul Morand le nom générique et euphémique de "Levantin" -, donc une religion de pouilleux basanés - tout à fait les Levantins de Morand -, et de ce que cette religion ait très largement contribué à la définition de notre identité... ; eh bien pour un Français il y a toujours la possibilité d'assimiler le catholicisme aux Romains, à "nos cousins Italiens", et à court-circuiter l'origine judéo-orientale de cette religion (au passage, Céline n'a pas tort de noter quelque part qu'il faut vraiment être con comme un Drumont pour être à la fois catholique et antisémite). Au lieu que les Allemands n'ont pas cette solution et sont donc obligés d'être plus cohérents avec la recherche de leurs origines s'ils veulent prendre leurs distances avec leurs racines catholiques. Ce qui serait cohérent avec les faits : ils ont été nazis, nous n'avons été "que" vichyssois.


A dire vrai, il y a au moins une autre possibilité, qui eut son heure de gloire au XIXe siècle, fut notamment adoptée par Richard Wagner, et qui permet d'éviter l'objection de Céline : séparer le catholicisme du judaïsme, pour en l'occurrence le rattacher au bouddhisme, à "l'esprit indo-européen", faire pencher le catholicisme dans la direction de l'ascétisme, du renoncement. Wagner, au moins cohérent dans son projet, cherchait vers la fin de sa vie à prouver que le Christ n'était pas juif. Dois-je préciser que ses arguments n'étaient pas tout à fait convaincants ? Ceci dit, ça ne m'empêche pas d'écouter du Wagner à peu près tous les jours depuis six mois, mais là n'est pas le problème.

Pourquoi les Italiens deviennent-ils racistes ? On sait qu'entre autres nombreux mérites - les pâtes, le bon cinéma, les femmes, la culture populaire, la Sicile, Verdi, Verdi, encore Verdi, et un peu Paolo Maldini - les Italiens avaient ce titre de gloire de n'avoir jamais, même au piteux temps mussolinien, créé de mouvement d'ensemble raciste. Il semblerait que cela change (un vrai point commun avec les Corses, pour le coup). Le café du commerce, n'ayant jamais peur de dire une connerie, suggère comme explication à cette regrettable évolution - remettant sine die un examen de cette hypothèse -, que le catholicisme tend à ne plus être le catholicisme, ou à l'être de moins en moins, et qu'il est donc moins armé pour faire obstacle à une idéologie raciste qu'il n'a pu l'être. Cette dernière remarque peut surprendre, mais s'il est vrai que l'on peut citer les lois espagnoles de pureté du sang ou tel ou tel débat sur l'âme des sauvages pour montrer que le catholicisme n'est pas exempt de tout reproche à ce sujet, il me semble que ces exemples restent minoritaires sur une histoire qui dure depuis maintenant plus de vingt siècles. Quant à l'évolution actuelle du catholicisme, il faut bien avouer que ses efforts pour être "moderne" me rendent très méfiant, d'autant plus que le fait qu'il fût en décalage avec l'époque commençait en revanche à me le rendre sympathique.


Les commerçants se mettent à installer leurs décorations de Noël. Portnoy, dans le roman éponyme, fâché avec sa judéité, disait tout de même qu'il lui suffisait de voir les catholiques acheter leurs sapins débiles et installer leurs épouvantables crèches pour avoir envie, un instant fugace, de se réconcilier avec la tradition dont il était issu. Comme je le comprends ! Mais sans doute Noël est-il plus païen que catholique.

Libellés : , , , , , , , ,

vendredi 25 novembre 2005

Mémoire en défense pour le circoncis du bulbe.

C'est entendu, M. Alain Finkielkraut n'a pas inventé l'eau tiède. C'est entendu, ses dernières déclarations - je conseille la version intégrale de l'interview donnée à Haaretz, complétée par l'analyse d'Acrimed - sont un tissu d'absurdités et d'amalgames douteux. Je trouve pourtant que dans leur ensemble les réactions que ces déclarations ont suscitées n'ont pas non plus été d'une grande finesse, voire qu'elle sont contre-productives. Je ne m'imaginais certes pas prendre un jour la défense du Juif le plus con de France (quoique, Alexandre Adler, tout de même...), et contre Acrimed qui plus est, mais voilà...


Tout d'abord, que les débiles nuisibles du MRAP portent l'affaire sur le terrain judiciaire, non seulement est un réflexe policier bien dans leur manière, mais apporte de l'eau au moulin du "persécuté" Finkielkraut. Certes je ne pleurerai pas s'il devait rembourser sur décision du tribunal une partie de l'argent public qu'il reçoit pour débiter des conneries à n'en plus finir chaque semaine que Dieu fait, mais est-ce que mettre ce médiocre pontifiant en face de sa propre vacuité cérébrale ne suffit pas ? La justice n'a-t-elle rien de mieux à faire que d'examiner à la loupe les divagations d'un intellectuel que tout le monde aura oublié dès qu'il sera trop gâteux pour animer son émission de merde, a fortiori quand la mort nous dispensera à tout jamais de devoir le supporter ? Et pour qui clame que tenir des propos comme ceux que son souci de la vérité l'a poussé à tenir à Haaretz lui fait risquer la prison, quelle meilleure confirmation qu'une plainte en justice déposée à son encontre ? Il est vrai que si les gens du MRAP étaient moins cons... ils ne seraient pas au MRAP.


Ensuite et surtout, "Fine-quelle-crotte" (J.-E. Hallier, pas très en forme ce jour-là) pose tout de même un problème que les donneurs de leçons d'Acrimed, tout empressés faire des amalgames avec le FN, ne semblent pas considérer comme important : et si, effectivement, beaucoup des émeutiers détestaient la France ? Voilà un point sur lequel il serait intéressant d'avoir des analyses chiffrées et nuancées, voilà une question que l'on ne peut prétendre balayer du revers de la main. Mouillons-nous un peu : s'il devait s'avérer que nombre des fauteurs de troubles détestaient notre pays, non seulement ils n'auraient pas nécessairement tort, mais cela devrait nous amener à voir comment il peut être plus aimable. Je ne parle évidemment pas seulement "d'améliorer l'ascenseur social" (blablabla), mais de retrouver une certaine âme collective (ce n'est pas demain la veille sans doute, je développe ceci un autre jour).

Je remarque d'ailleurs que les propos tenus par le judéo-crétin de service au sujet de l'école républicaine et de sa décadence n'ont pas été très relevés par les indignés, de service eux aussi : certes l'antienne n'est pas neuve, certes elle n'est pas bien passionnante, mais les problèmes de l'école - ou plutôt peut-être : de ses liens avec le pays - n'en sont pas moins réels pour autant. (Je propose quant à moi un élément de solution : rétablir l'enseignement obligatoire du latin.)

Mais revenons aux émeutiers. Puisque tout le monde a un avis sur eux, voilà en partie le mien : pourquoi la religion n'aurait-elle pas joué un rôle dans leurs actions ? Pourquoi serait-ce si choquant ? Si la religion c'est la société vue sous un autre angle (bienvenue Durkheim ! - saint patron de l'école laïque soit dit en passant), en tant qu'elle surplombe les individus et les unit, et si la France a bien du mal à les unir par ailleurs, n'est-il pas logique que des individus dont l'histoire culturelle a partie liée avec des religions communautaires se retrouvent pour des actions collectives - certes un rien violentes et destructrices, mais tout de même nécessairement synonymes d'espoir ? Cela dépasse de loin la question du rôle des imams, et cela peut éclairer la remarque de l'intellectuel le moins nuancé de France (quoique, tout de même, Claude Imbert...) sur la passivité de populations dont le "fonds religieux" est moins communautaire, en tout cas actuellement, comme les français d'origine vietnamienne ou portugaise. Tout cela n'excluant pas d'autres facteurs, "socio-économiques".

Bref : même s'il nous fait rire, il est parfois regrettable qu'Alain Finkielkraut soit si bête, car dans cette affaire il fait tout pour que les bonnes consciences perpétuelles passent à côté de problèmes pourtant importants. Et qui ne sont pas près d'être résolus. Je ne sais pas si les banlieues se révolteront de nouveau, mais si tel devait être le cas, elles risqueraient de le faire dans des proportions nettement plus dramatiques que quelques dégâts matériels.



PS, quelques heures après : le compte-rendu de l'interview donnée à Haaretz sur l'Observatoire du communautarisme n'est pas une mauvaise synthèse.

PS 2, 18 heures : il n'est pas inintéressant, et il est en tout cas fair play de lire la transcription par Les Ogres d'une justification du ramolli du cervelet.

Libellés : , , , , ,

dimanche 20 novembre 2005

Merci M. Muray.

Cet homme pond un peu trop pour être honnête, mais de temps en temps on doit lui payer tribut :

"Je n'accepte pas que tous les cochons roses d'Occident racontent, quand ils envoient leurs saloperies de bombes n'importe où, qu'ils font de l'Histoire. Je n'accepte pas que ces émasculés en survêtement, chargés d'enfants et soumis à leurs femmes, racontent ça. Je ne l'accepte pas. Je ne l'accepterai jamais. L'Histoire est définitivement incompatible avec le triomphe du féminisme ; et le féminisme, ou plutôt le féminihilisme, est très exactement et très rigoureusement l'organisation méticuleuse de la fin de l'Histoire."

Stimulant, isn't it ? J'ajouterai que je n'ai pas grand-chose contre le féminisme, sauf quand il gagne.

Libellés : ,

samedi 19 novembre 2005

Etiquette.

Extrême-gauche.

Tendance : conservateur.



(Mais pas conservateur d'extrême-gauche).

jeudi 17 novembre 2005

Un bon socialiste est un socialiste mort (guillotiné).

De combien de trahisons et de bas compromis devront encore se rendre coupables les dirigeants du Parti Socialiste pour que ceux qui s'estiment "de gauche" - notion que je prétendrai ici à peu près définie - les laissent définitivement tomber ?

Je n'en sais rien. On peut les imaginer encore là dans trente ans à nous promettre que la prochaine fois qu'ils seront au pouvoir ils arrangeront enfin les choses - que la fois précédente ils auront bien entendu contribué à dégrader. Il se peut aussi que leurs bastions de fonctionnaires les lâchent et que le PS ne soit plus qu'une survivance genre MRG d'ici cinq ans. S'il fallait vraiment choisir, je pencherais vers cette seconde solution, mais il est fort possible que je prenne mes désirs pour d'imminentes réalités.

Quoi qu'il en soit, en cette date voisine d'un congrès dont il ne semble guère permis d'espérer grand-chose, je voudrais commencer une série révisionniste, dans laquelle j'espère, sinon détruire, du moins fortement relativiser certains des mythes qui ancrent dans l'esprit des gens l'idée qu'"un jour peut-être, ils feront comme en 36, comme en 81..."

Aujourd'hui, le sujet qui demande le moins de recherches historiques : l'abolition de la peine de mort.

On peut être contre la peine capitale, il demeure abusif de n'y voir qu'un reste de barbarie moyenâgeuse. La peine définitive, c'est avant tout une façon de prendre au sérieux certains crimes et délits, de proclamer qu'à partir de telle limite, "on ne rigole plus". Quand on entend dire que, pour tel ou tel crime - en ce moment, les viols d'enfants -, "il faut rétablir la peine de mort", eh bien une telle sentence exprime une bonne compréhension du mécanisme de la dite peine.

Faut-il en conclure que cette sentence suprême est nécessaire au bon fonctionnement d'une société ? Je ne vois pas ce qui permet de l'affirmer. Si sa principale fonction est de l'ordre du symbolique (car on sait bien que sa capacité de dissuasion est très faible), le symbolique - comme le religieux soit dit en passant, j'y reviendrai très certainement un jour -, est quelque chose de plus souple qu'il n'y paraît. On voit d'ailleurs que l'on essaie désormais de placer cette barre symbolique du côté de la perpétuité ou des peines incompressibles, mais que cela est moins décisif - moins tranchant - que le couperet supposé, selon son inventeur, procurer tout au plus "une légère sensation de fraîcheur sur le col". Un enfant qui transgresse un interdit se fait taper sur les doigts, un adulte qui en transgresse un autre se fait raccourcir. On est libre de ne pas apprécier ce mécanisme. Il reste qu'il aurait peut-être fallu sinon mieux voir comment le remplacer, du moins s'être donné les moyens de le faire. On loue toujours F. Mitterrand d'avoir eu le courage d'annoncer lors de la campagne présidentielle de 1981, contre l'opinion publique, que s'il était élu il abolirait la peine de mort. Admettons. Sans doute néanmoins aurait-il dû aussi avoir le courage, pendant les quatorze années qui suivirent, de mettre en place une politique empêchant que l'immense majorité des détenus subissent le contre-coup au sein de "la majorité silencieuse" - et de l'administration pénitentiaire, depuis longtemps un état dans l'état, comme on dit - de la disparition de la fonction symbolique de "la veuve".

Il ne s'agit pas tant de rétablir la peine de mort, ce qui très probablement n'améliorera en rien la condition des détenus - dont je ne prétends nullement d'ailleurs qu'elle ait été d'une grande dignité jusqu'au printemps 1981. Mais on voit bien qu'une soupape de sécurité a sauté et que ce sont les détenus qui en font les frais. Mettons les choses au clair : si le choix était à faire entre une exécution de temps à autre, garantissant un traitement relativement digne (je ne me cache pas le paradoxe de cette expression, mais enfin ce n'est pas moi qui ai inventé la prison) à l'ensemble des prisonniers, et la situation actuelle, je choisirais la première solution. Et que l'on me réponde pas sur le terrain des erreurs judiciaires - dont je ne sache pas qu'elles aient diminué avec la mise au placard du rasoir national, ni qu'il soit devenu dans les faits tellement plus facile d'y remédier (évidemment, entre difficile et impossible, il y a une marge...) - ou de la barbarie - si la situation actuelle et son taux de suicides record n'est pas barbare, alors...

Le problème, je le répète, c'est que si peut-être le choix a pu se poser en ces termes il y a vingt-cinq ans, ce n'est plus le cas. Je veux bien par ailleurs que le contexte sécuritaire actuel ne repose pas que sur la disparition de la peine capitale, mais il n'est tout de même pas besoin de grandes études scientifiques et statistiques - une oreille et un cerveau suffisent - pour comprendre qu'elle participe du malaise actuel.

En guise de conclusion, je vais essayer d'être le plus clair possible. Je n'ai pas cherché à savoir si l'abolition de la peine de mort avait été une bonne mesure : la question ne se pose pas en ces termes. J'ai essayé de montrer que, n'ayant pas été accompagnée des précautions nécessaires - au moins dans les faits, sinon dans les intentions - elle a très vraisemblablement créé ou accentué plus de problèmes qu'elle n'en a réglés - à bon compte dans la conscience de certains. Je ne prétends pas que, à la fois supprimer la peine capitale, trouver une dimension symbolique adéquate pour lui servir de substitut, affronter les réflexes hostiles de l'opinion publique et de l'administration pénitentiaire, constitue une tâche aisée. Je sais aussi, dois-je le préciser, qu'il est toujours plus facile de juger avec le recul.

Mais il m'importait de montrer que l'on ne peut se contenter de citer "l'abolition de la peine de mort" comme un haut faits d'armes participant de la légende socialiste, sans autres commentaires qu'élogieux. Et c'est ce que j'espère avoir fait.

Libellés : , , ,

lundi 14 novembre 2005

21 avril.

Puisque tout le monde dit qu'"au train où ça va" nous aurons droit à un deuxième tour opposant Nicolas Sarkozy à Jean-Marie Le Pen en 2007, peut-être est-il déjà temps de se demander pour qui voter à ce moment-là ?

Dieudonné, il y a quelques mois, avait si je ne me trompe clairement exprimé sa préférence pour le second.

Libellés : , ,

mardi 8 novembre 2005

Quelques remarques.

Devant des événements sans proportion avec ceux qui occupent actuellement le devant de la scène, lors de la Grande Guerre, Karl Kraus avait lancé : "Que celui qui a quelque chose à dire s'avance et se taise."

Dans certains cas mieux vaut ne pas trop en faire... J'aligne juste deux ou trois observations.


Piqué sur un blog : "Le seul truc que je ne comprends pas, c'est comment tous ces gens, cette masse immense de personnes parquées à la périphérie des villes, de la société, de la vie, parfois, comment ils ont pu supporter ça aussi longtemps."

Philippe de Villiers a repris un vieux slogan de Jean-Marie Le Pen : "La France, aimez-la ou quittez-la." Encore faut-il qu'elle soit aimable !

Un bon film sur ce sujet : L'amour existe, Maurice Pialat - 1960.

L'Afrique et l'Irak continuent à crever. Tout ce foin pour trois morts et quelques bagnoles...

Une loi remontant à la guerre d'Algérie pour mettre au pas certaines populations "issues de l'immigration". C'est farce.

Dans l'hypothèse où des lecteurs connaitraient des blogs d'émeutiers ou de leurs proches, peuvent-ils me le faire savoir ?

Une pensée pour les policiers, qui doivent commencer à fatiguer.





Et un peu de positif : si ces mouvements sporadiques et tout compte fait pour l'instant assez minimes étaient comme le pendant, de la part des gens qui n'ont pas le droit de vote ou l'envie de voter, au "non" du 29 mai dernier ? Si c'était là un nouveau tour de "la nation politique par excellence" ? Cette hypothèse est fragile, je veux bien : est-elle si aisée à réfuter ?

Libellés : , , , ,

samedi 5 novembre 2005

Les écolos sont des cons.

Qu'est-ce qui pollue le plus : une voiture qui roule, ou une voiture qui brûle ?

Guerre civile. (Ajout le 19.01.06).

A la boulangerie du coin, ce matin. Et à deux cent mètres environ de voitures brûlées cette nuit.

"La blonde" :
- Mais c'est sur Sarkozy qu'il faut taper ! Ces jeunes ne comprennent rien.

"La femme arabe", et voilée, à la boulangère, elle-même voilée :
- Moi je vais vous dire madame. Il faut respecter tout le monde, tout le monde est égaux. Les Juifs, les Arabes, les Français, les Américains...

AMG :
- Les Américains, tout de même, madame...

"La femme arabe" :
- Mais c'est leur président, Bush, le salaud...

AMG :
- Ah, ils l'ont élu, ils l'ont voulu.

"La femme arabe" :
- C'est Bush et Sarkozy qu'il faut arroser d'essence, après ça sera plus simple Monsieur.

La boulangère :
- Qu'est-ce que je vous sers, Monsieur ?

AMG, tout sourire au deux femmes :
- Un pain aux raisins, Madame.


On aimerait que cet épisode soit représentatif. Je vous le livre tel quel (sans le pain aux raisins, délicieux).





Une citation ? Une citation, d'accord. Je la dédie à mon ami Philippe N. Appelons ce texte L'Epître aux Sunnites.


"Que la paix et que la miséricorde et la bénédiction de Dieu soient avec vous.

Même si nous sommes éloignés par le corps, la distance est mince qui sépare nos cœurs. (...)

Voici, pour ce que ma vision limitée me permet d'en voir, comment se présente la situation actuelle. Je demande à Dieu de me pardonner mon babillage et mes écarts. Je dis, après avoir sollicité l'aide de Dieu, que les Américains (...) sont entrés en Irak sur la base d'un contrat en vue de créer l'Etat du Grand Israël, du Nil jusqu'à l'Euphrate, et que cette Administration Américaine Sionisée pense qu'en hâtant la création de l'Etat d[u Grand] Israël elle hâtera l'arrivée du Messie. Elle est venue en Irak avec tous ses hommes et toute sa fierté pleine de morgue envers Dieu et son Prophète. (...)

Le combat que nous livrons aux Américains est chose facile. L'ennemi est apparent, il est à découvert et ne connaît pas le terrain ou la situation actuelle des moudjahidin, car ses sources de renseignements sont faibles. Nous tenons pour certain que les forces armées de ces Croisés disparaîtront prochainement. Lorsque l'on examine la situation actuelle, on peut remarquer combien l'ennemi s'est empressé de mettre en place l'armée et la police [locales] qui ont commencé à remplir les missions qui leur ont été assignées. C'est cet ennemi-là, composé de Chiites auxquels se sont adjoints des agents sunnites, qui constitue le véritable danger auquel nous sommes confrontés, car il est [composé de] nos concitoyens, qui nous connaissent mieux que personne. (...) Ils ont commencé par tuer de nombreux frères moudjahidin, puis ils se sont mis à liquider les scientifiques, les penseurs, les docteurs, les ingénieurs et d'autres encore. Dieu seul sait ce qui adviendra, mais je crois pour ma part que le pire ne sera pas derrière nous tant que l'armée américaine campera sur ses positions arrières et que l'armée secrète chiite et ses brigades militaires continueront de combattre à ses côtés. Ils s'infiltrent comme des serpents pour prendre le contrôle de l'armée et des forces de police, qui constituent l'arme principale et la main de fer de notre Tiers Monde, et pour s'accaparer toutes les structures économiques comme leurs tuteurs, les Juifs. (...)

Ici, hélas, le djihad [se traduit par] les champs de mines, les tirs de roquettes et les éclats de mortiers qui résonnent au loin. Les frères irakiens privilégient encore leur sécurité et préfèrent retourner dans les bras de leurs femmes, à l'abri de toutes les craintes. Les membres de ces groupes se vantent parfois de ce qu'aucun des leurs n'a été tué ou fait prisonnier. Nous leur avons dit, lors de nos nombreuses rencontres, que la sécurité et la victoire sont incompatibles, que l'arbre du triomphe et de l'accès au pouvoir ne saurait atteindre à sa pleine majesté sans puiser dans le sang ni braver la mort, que la nation [islamique] ne peut vivre sans goûter au martyre ni humer le parfum du sang versé au nom de Dieu, et que le peuple ne sortira pas de sa torpeur tant que le souci du sacrifice et le récit des martyrs ne les occuperont pas jour et nuit. La question requiert plus de patience et de conviction. Nous avons grand espoir en Dieu. (...)

Le peuple doit se garder de s'abreuver du miel et des plaisirs qui lui étaient jusqu'alors inaccessibles, car les hommes risqueraient alors de céder à la faiblesse, préférer la sécurité de leurs foyers et rester sourds au fracas des épées et au hennissement des chevaux. (...)

Que la paix et que la miséricorde et la bénédiction de Dieu soient avec vous."


Ahmad Fadil Nazzal Al-Khalayleh, dit Abou Moussab Al-Zarkaoui, 2003 (?).


Ce soir : coq au vin !




(Ajout le 19.01.06). J'ai lu à deux reprises depuis, dont une dans le Monde diplomatique, que le texte de M. Zarkaoui brièvement cité ici, était sans doute - le fait n'est pas prouvé - un apocryphe rédigé par la CIA ou apparenté. Il se peut - les écrits de M. Zarkaoui sont moins fréquents que ses actes ne sont frappants, il est donc difficile de faire une comparaison stylistique, a fortiori quand on ne connaît pas l'arabe. Mais si ce fait était avéré, cette question au moins se poserait : des services capables de rédiger un texte décrivant aussi bien l'état d'esprit d'un résistant n'auraient-ils pu avertir les décideurs de l'agression américaine en Irak de ce qui pouvait les attendre ?

Libellés : ,

vendredi 4 novembre 2005

"Il n'y a ici que des athées ou des superstitieux."

Pour une fois qu'il se passe un peu quelque chose en France, les gens qui se plaignent d'habitude de s'ennuyer - râlent. Et qu'il y a des dealers en banlieue, et qu'il faut tout de même pas brûler les voitures, et qu'il y a des machos aussi en banlieue, et qu'en plus on y trouve des imams (qui se mêlent d'y ramener le calme, les salauds), et que les media et les gens de gauche disent des conneries mais que grosso modo je les répète, et que ça va faire voter Le Pen ou Sarkozy, et que pourtant en banlieue il y a plein de gentils garçons, plus gentils que les agriculteurs qui votent FN, et que d'ailleurs les curés sont des gros refoulés, etc., etc. (Deux exemples, l'un"anar", l'autre "gauche-radicale" - je ne garantis ni l'exactitude des étiquettes, ni que ces gens-là soient d'accord sur tous ces points.)

Chacun certes peut avoir son opinion et l'envie de la faire connaître, mais un peu d'humilité serait-elle tellement déplacée ? Si cela dérange à ce point ces messieurs que les jeunes mettent un peu de pagaille, qu'ils aillent aider les flics ou appeler au calme eux-mêmes, après tout. C'est le métier des flics et des travailleurs sociaux ? Donc on ne fait rien sans être payé pour, si je comprends bien. Au moins les agitateurs font-ils cela gratuitement, eux, et prennent-ils des risques, eux. Et pour cela, chapeau bas.

On peut bien sûr estimer, pourquoi pas, que les moyens utilisés ne sont pas en adéquation avec les buts poursuivis. Cela reste à prouver - le but premier semble clair : détruire - ; mais une fois ces preuves apportées, cela effacera-t-il le courage de ces jeunes combattants ? Ils sont très cons, me répondra-t-on. Eh bien, que celui qui a une meilleure idée qu'eux de ce qu'ils doivent faire leur jette la première pierre - mais en vrai, au sens propre, et avec le courage de ses convictions.

(Reconnaissance de dette, tout de même : Heil !)




Un peu de philosophie, sans grand rapport :

"Il pourrait se faire que la science et l'industrie, et leur progrès, soient le plus durable du monde d'aujourd'hui. Il pourrait se faire que toute conjecture concernant un effondrement de la science et de l'industrie ne soit pour l'instant, et pour longtemps, qu'un simple rêve, et que ce soient la science et l'industrie qui, au terme de misères infinies, et à travers elles, uniront le monde, je veux dire le rassemblement en un tout, dans lequel, il est vrai, la paix sera la dernière à s'installer.

Car ce sont bel et bien la science et l'industrie qui décident les guerres, du moins c'est ce qu'il semble."

Il pourrait se faire que Wittgenstein, écrivant cela en 1947, ait eu raison.

(Il y aurait ceci posé beaucoup à dire, et sans angélisme, sur la façon dont il lie "science" et "industrie".)



Et puis tiens, encore un peu de Wittgenstein (je me damnerais pour ces juifs athées) :

"La foi religieuse et la superstition sont choses fort différentes. La seconde vient de la peur et est une sorte de fausse science. La première est une confiance." (1948). Mais j'y reviendrai...

Libellés : , , , , ,

mercredi 2 novembre 2005

Séduisant. Vrai ?

Je retrouve par hasard ce texte. Si l'on y met de côté quelques accents pompeux et une saillie bien commode contre la philosophie analytique, il y a me semble-t-il de quoi faire (les italiques sont de l'auteur, j'ai souligné un passage en gras) :

"De quoi en effet se compose notre actualité ? La réduction progressive de la vérité (donc de la pensée) à la forme langagière du jugement, point sur lequel s’accordent l’idéologie analytique anglo-saxonne et la tradition herméneutique (le doublet analytique/herméneutique cadenasse la philosophie académique contemporaine) aboutit à un relativisme culturel et historique qui est aujourd’hui simultanément un thème d’opinion, une motivation "politique" et un cadre de recherche pour les sciences humaines. Les formes extrêmes de ce relativisme, déjà à l’œuvre, prétendent assigner la mathématique elle-même à un ensemble "occidental" auquel on peut faire équivaloir n’importe quel dispositif obscurantiste ou symboliquement dérisoire, pourvu qu’on soit en état de nommer le sous-ensemble humain qui porte ce dispositif, et mieux encore qu’on ait des raisons de croire que ce sous-ensemble est composé de victimes. C’est à l’épreuve de ce croisement entre l’idéologie culturaliste et la conception victimaire de l’homme que succombe tout accès à l’universel, lequel ni ne tolère qu’on l’assigne à une particularité, ni n’entretient de rapport direct avec le statut – dominant ou victimaire – des lieux où en émerge la proposition.

Quel est le réel unificateur de cette promotion de la vertu culturelle des sous-ensembles opprimés, de cet éloge langagier des particularismes communautaires (lesquels renvoient toujours en définitive, outre la langue, à la race, à la nation, à la religion ou au sexe) ? C’est, de toute évidence, l’abstraction monétaire, dont le faux universel s’accommode parfaitement des bigarrures communautaristes. La longue expérience des dictatures communistes aura eu le mérite de montrer que la mondialisation financière, le règne sans partage de l’universalité vide du capital, n’avaient pour ennemi véritable qu’un autre projet universel, même dévoyé et ensanglanté, que seuls Lénine et Mao faisaient réellement peur à qui se proposait de vanter sans restriction les mérites libéraux de l’équivalent général, ou les vertus démocratiques de la communication commerciale. L’effondrement sénile de l’URSS, paradigme des Etats socialistes, a levé provisoirement la peur, déchaîné l’abstraction vide, abaissé la pensée de tous. Et ce n’est certes pas en renonçant à l’universel concret des vérités pour affirmer le droit des "minorités" raciales, religieuses, nationales ou sexuelles, qu’on ralentira la dévastation. Non, nous ne laisserons pas les droits de la vérité-pensée n’avoir pour instances que le monétarisme libre-échangiste et son médiocre pendant politique, le capitalo-parlementarisme, dont le beau mot de "démocratie" couvre de plus en plus mal la misère."

A. Badiou, Saint Paul, 1997.

Libellés : , ,