mercredi 11 juillet 2007

Fusées.

Voici quelques notes prises dans Immédiatement (D. de Roux, 1972). Je les reproduis sans commentaire et, sauf exceptions sur la fin, dans l'ordre dans lequel on les découvre à la lecture du livre - sans donc faire de regroupement thématique. J'ai maintenu certains enchaînements, ou passages du coq-à-l'âne. Je me contente de fournir la référence, en chiffres romains, au chapitre dont sont issues les citations. Nous aurons j'espère l'occasion de revenir sur certaines d'entre elles.


"Il faut s'envelopper d'une jeune femme comme les envahisseurs mongols de quartiers de boeufs. En amour, il faut entrer dans une femme comme le rat dans un supplicié chinois.

La différence entre Alexandre Dumas et Balzac c'est l'intention monarchique que Balzac a mise dans son oeuvre. Mais pourra-t-on retrouver la grande aisance classique d'une certaine langue française ? Il n'y a plus de France. Il n'y a plus qu'une bourgeoisie française, et une classe ouvrière qui n'a jamais réussi à se saisir."


"Les Juifs et les Allemands ont ceci de commun qu'ils vivent et ont toujours vécu un jour avant l'avènement du Christ. Le monde entier est engagé dans l'histoire tandis qu'ils n'ont pas cessé de vivre une histoire parallèle."


"La crise de l'intelligence provient du fait qu'on veut se définir avec des mots alors qu'on ne se définit qu'en agissant."


"Les ouvriers pris de vitesse par le gaullisme sont devenus des bourgeois avant même qu'ils aient eu le temps de souffler comme ouvriers."


"Cet anarchiste espagnol fusillé en compagnie de prêtres et de fascistes et qui, entendant les prêtres crier "Viva el Cristo Rey" et les franquistes "Viva Franco", était ennuyé de ne trouver à crier sous les balles que "Vive la Sécurité sociale"." (VI)


"En Europe nous sommes devenus une race d'orphelins. Notre grand-père est mort. Notre père est mort. Notre Dieu, en plus, est mort. Et on ne peut pas s'aimer entre orphelins." (VII)


"Europe, Union soviétique, Asie, nous sommes tous de la Cité antique de Fustel de Coulanges. Seule l'Amérique incarne le pouvoir révolutionnaire, celui de la désintégration de la nation, désintégration confessionnelle, individualisme démocratique qui se prête à toutes les tentations du capital. C'est la tragédie du chaos, le tourbillon final des Mères fondatrices soudain frappées par la folie, par le besoin de tout remporter dans le gouffre d'où elles viennent de sortir." (VII)


"Au gaullisme succédera ou l'Allemagne ou pire : les Français.

Les femmes ont de l'argent, voitures, studio (le cri de Virginia Woolf n'a plus aucun sens : "Pourquoi les femmes sont-elles si pauvres ?"). Plus personne ne baise à Paris. Les femmes ne sortent plus, regardent la télévision, se couchent de bonne heure car le lendemain elles doivent aller au travail. Les hommes se divertissent entre eux ou baisent à l'étranger. Il n'y a plus de séduction, sauf chez les parias supérieurs qui, eux, ont du temps à perdre. On s'occupe des révolutions, de l'abrutissement, de la faim, mais personne ne s'occupe des femmes, les seules vraies désespérées. D'ailleurs c'est bien fait pour leur gueule de criminelles nées." (IX)


"L'Empire est à l'envers et les coqs chantent la nuit : la gauche est devenue la droite et la droite n'est plus rien, les laïcs sont devenus des prêtres athées et l'Eglise se hisse au niveau de la pire presse du coeur à la française. L'anti-conformisme n'est plus que le conformisme des mots galvaudés comme celui de "révolution", sophistiqué, onanisant. C'est le pacte général avec la classe moyenne, elle-même intégrée à sa police proxénète, trafiquante et assassine.

Seule volonté alors, tourner son visage vers l'oubli. Mourir seul, et dans un froid absolument glacial.


Après vingt ans de travail forcené, macération, flagellation, Swendenborg arriva à voir les Esprits, et, dit-il, ils avaient tous des chapeaux sur la tête.

Jusqu'où va le protestantisme." (XI)


"Rencontré cette jeune femme qui ne parlait plus que d'enfants, d'accoucheurs, de ventres et de frigidaires pleins pour une année." (XII)


"Guénon s'est fait égyptien pour disloquer l'Islam de l'intérieur, cet Islam qui part du judaïsme et ne s'arrête nulle part." (XII)



Je finis sur cet hommage prophétique à M. Oussama Ben Laden :

"Il n'y a pas crise de la civilisation, mais crise de la barbarie. Autrefois les Barbares prenaient Rome, mettaient Byzance à sac. Maintenant on nourrit les Barbares qui sont les sous-alimentés du monde moderne." (VIII)


et sur cette note pessimiste, ethnologique et énigmatique :


"Aucun sacrifice ne modifiera les formes naturelles du mal." (XIII)

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