mardi 30 août 2011

Comme bonjour.

"Il n'y a ici-bas, à proprement parler, qu'une seule beauté, c'est la beauté du monde."

"On parvient à une vue extrêmement simple de l'univers. Dieu a créé, c'est-à-dire non pas qu'il a produit quelque chose hors de soi, mais qu'il s'est retiré, permettant à une partie de l'être d'être autre que Dieu. A ce renoncement divin répond le renoncement [de la part] de la création, c'est-à-dire l'obéissance. L'univers entier n'est pas autre chose qu'une masse compacte d'obéissance. Cette masse compacte est parsemée de points lumineux. Chacun de ces points est la partie surnaturelle de l'âme d'une créature raisonnable qui aime Dieu et qui consent à obéir. Le reste de l'âme est pris dans la masse compacte. Les êtres doués de raison qui n'aiment pas Dieu sont seulement des fragments de masse compacte et obscure. Eux aussi sont tout entiers obéissance, mais seulement à la manière d'une pierre qui tombe. Leur âme aussi est matière, matière psychique, soumise à un mécanisme aussi rigoureux que celui de la pesanteur. Même leur croyance en leur propre libre arbitre, les illusions de leur orgueil, leurs défis, leurs révoltes, tout cela, ce sont simplement des phénomènes aussi rigoureusement déterminés que la réfraction de la lumière. Considérés ainsi, comme matière inerte, les pires criminels font partie de l'ordre du monde et par suite de la beauté du monde. Tout obéit à Dieu, par suite tout est parfaitement beau. Savoir cela, le savoir réellement, c'est être parfait comme le Père céleste est parfait.

Cet amour universel n'appartient qu'à la faculté contemplative de l'âme. Celui qui aime vraiment Dieu laisse à chaque partie de son âme sa fonction propre. Au-dessous de la faculté de contemplation surnaturelle se trouve une partie de l'âme qui est au niveau de l'obligation, et pour laquelle l'opposition du bien et du mal doit avoir toute la force possible. Au-dessous encore est la partie animale de l'âme qui doit être méthodiquement dressée par une savante combinaison de coups de fouet et de morceaux de sucre.

Chez ceux qui aiment Dieu, chez ceux mêmes qui sont parfaits, la partie naturelle de l'âme est toujours entièrement soumise à la nécessité mécanique. Mais la présence de l'amour surnaturel dans l'âme constitue un facteur nouveau du mécanisme et le transforme.

Nous sommes comme des naufragés accrochés à des planches sur la mer et ballottés d'une manière entièrement passive par tous les mouvements des flots. Du haut du ciel Dieu lance à chacun une corde. Celui qui saisit la corde et ne la lâche pas malgré la douleur et la peur, reste autant que les autres soumis aux poussées des vagues ; seulement ces poussées se combinent avec la tension de la corde pour former un ensemble mécanique différent.

Ainsi, quoique le surnaturel ne descende pas dans le domaine de la nature, la nature est pourtant changée par la présence du surnaturel. La vertu, qui est commune à tous ceux qui aiment Dieu, et les miracles les plus surprenants de certains saints, s'expliquent pareillement par cette influence, qui est aussi mystérieuse que la beauté et de même espèce. L'une et l'autre sont le reflet du surnaturel dans la nature."

- si après ça vous n'avez pas compris... (Commentaires de textes pythagoriciens, 1942, p. 619 et 621-22 du « Quarto ».)



Après de telles hauteurs, une petite réflexion personnelle, sans grand rapport, qui m'est venue en voyant ma douce dialoguer avec des amies sur F-book. Non seulement les femmes ne se rendent pas compte de la force qu'elles représentent, notamment par l'incessant échange d'informations auquel elles se prêtent sans relâche, dans les domaines les plus divers, avec tout ce qui en ressort dans ces mêmes domaines (vie familiale, décoration, achats, mode, santé, etc. etc.), non seulement elles ne se rendent pas vraiment compte de l'immense force de mouvement qu'elles activent en permanence - et à qui Facebook donne une nouvelle caisse de résonnance -, mais c'est en partie parce qu'elles ne réalisent pas quelle est cette force, qu'elles sont si fortes, puisque c'est en partie sur un arrière-plan d'une impression de faiblesse par rapport aux hommes, qu'elles développent cette force collective. - Autant dire que la guerre des sexes n'est pas finie, bon courage à toutes et à tous...


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P.S. Je reçois des commentaires mais ne peux les lire et les faire connaître. Je réitère donc mon conseil de me les envoyer directement par mail si vous constatez qu'il ne sont pas publiés.

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mardi 23 août 2011

Sans trop de commentaires. (Ajout le lendemain.) - Nigger of the day, XII.

"Un jour, un jour viendra pour l'univers où toutes ses lois seront bouleversées ; le pôle austral écrasera toutes les étendues libyennes."

Sénèque, Hercule à l'Oeta - cité par Simone Weil en 1942, lu par bibi hier. Bon, c'est plutôt le pôle septentrional qui « bouleverse les lois », y compris celles qui sont censées être les siennes, mais cela m'a bien sûr fait sourire à la lecture. J'ajouterai que S. W. repense ici à Sénèque alors qu'elle est en pleine méditation sur la notion de fin du monde.

Lue quelques minutes après, cette autre phrase, dans la célèbre lettre qu'elle adressa à Bernanos après avoir découvert Les grands cimetières sous la lune : "Les humiliations infligées par mon pays me sont plus douloureuses que celles qu'il peut subir." (1938, p. 409 de l'édition « Quarto »)

État d'esprit d'autant moins partagé par mes contemporains que :

"Une atmosphère lourde, opaque, étouffante s'est établie sur le pays, de sorte que les gens ont le cafard et sont mécontents de tout, mais d'autre part sont disposés à encaisser n'importe quoi sans protestations et même sans surprise." (ébauche de lettre à son frère en 1939, avant le début de la guerre, citée par S. Pétrement p. 509 de La vie de Simone Weil)

A encaisser n'importe quoi, à faire encaisser aux autres n'importe quoi, à croire n'importe quoi. Évoquant L'enracinement, S. Pétrement rappelle que S. W., dans son projet de société future, y "juge nécessaire (...) qu'on interdise toute propagande de parti et aussi toute pression d'un groupe sur ses propres membres pour imposer certaines opinions (c'est-à-dire toute pression exercée en vertu de la notion d'orthodoxie). Elle conseille aussi que soient créés des sortes de tribunaux devant lesquels on pourrait citer tout écrivain ou journaliste qui aurait soit publié sciemment des mensonges, soit publiés des erreurs qu'il pouvait facilement éviter." (p. 655)

- si tous les cocus avaient des clochettes... Sur le même sujet, Thierry Meyssan disait il y a peu la même chose.

L'Occident est mort, mais il tue encore !



(Ajout le 24.08.11)
Certaines conclusions à ce qui précède étaient implicites, mais un autre texte de S. W., lu hier, les formulant mieux que je ne saurais le faire, je reprends la plume pour laisser la parole au maître (à la "maitresse" ? ça fait école primaire ou SM...) :

"Dès que la vérité disparaît, l'utilité aussitôt prend sa place. (...)

Depuis longtemps déjà, dans tous les domaines sans exception, les gardiens en titre des valeurs spirituelles les avaient laissé se dégrader, par leur propre carence et sans nulle contrainte extérieure. Une sorte de crainte nous empêche de le reconnaître, comme si nous risquions ainsi de porter atteinte à ces valeurs elles-mêmes : mais loin de là, dans la période peut-être fort longue de douleur et d'humiliation où nous nous sommes engagés, nous ne pouvons retrouver un jour ce qui nous manque que si nous sentons de toute notre âme à quel point nous avons mérité notre sort. Nous voyons la force des armes asservir de plus en plus l'intelligence, et la souffrance rend aujourd'hui cet asservissement sensible à tous : mais l'intelligence s'était déjà abaissée jusqu'à l'état de servitude avant d'avoir personne à qui obéir. Si quelqu'un va s'exposer comme esclave sur le marché, quoi d'étonnant qu'il trouve un maître ?" (Réflexions à propos de la théorie des quanta, 1942, pp. 591-92 de l'édition « Quarto ».)



Et tant que nous y sommes, ajoutons ce « syllogisme de l'amertume » de Herr Cioran, relu hier : s'il n'est pas du même niveau, il est assez amusant, voire potache (ce qu'il écrit ferait, soit dit en passant, hurler de rage le baron Evola, mais ne nous dispersons pas) :

"Pourra-ton méridionaliser les peuples graves ? L'avenir de l'Europe est suspendu à cette question. Si les Allemands se remettent à travailler comme naguère, l'Occident est perdu ; de même si les Russes ne retrouvent pas leur vieil amour de la paresse. Il faudrait développer chez les uns et les autres le goût du farniente, de l'apathie et de la sieste, leur faire miroiter les délices de l'avachissement et de la versatilité.

...A moins de nous résigner aux solutions que la Prusse, ou la Sibérie, infligerait à notre dilettantisme." (1952 - p. 771 de l'édition « Quarto ».)

Il manque bien sûr les Américains à ce tableau, mais soixante après, il sonne pour le moins juste.


Un peu de dégoût pour finir :



Billie holiday Strange fruit






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jeudi 11 août 2011

"Qui ceci, qui cela."

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Quelques brèves (de comptoir, bien sûr) :

- il semble qu'il y ait, comme cela arrive de temps à autre, un problème avec la fonction "Commentaires". Vous pouvez m'envoyer vos réactions par mail, en précisant de quel « post » vous parlez, je les intégrerai dans le corps du texte, le temps que la situation se rétablisse.

- ce qui fonctionne, en revanche, ce sont les statistiques fournies par M. Blogspot, et qui m'ont récemment permis de découvrir qu'un site lié au Monde me classait à la jonction même entre la droite et l'extrême-droite. Cela m'était déjà arrivé il y a cinq ans (!!!!!! - je ne sais pas si le temps existe, mais il passe, l'enflé) : un truc du même genre - le lien ne donne plus rien, la Toile l'a absorbé - me cataloguait aussi droite.

- à ce sujet, avant de revenir sur ces classements, une digression : cela faisait un certain temps que je le pensais à part moi, l'archiviste Emmanuel Ratier le confirme de son côté dans son entretien avec Égalité & Réconciliation : les informations diffusées sur Internet ont une durée de vie bien inférieure à celle assurée, malgré d'éventuelles vicissitudes matérielles, par l'imprimé. Je dirais même plus, Internet n'a rien d'éternel en soi et pourrait très bien disparaître un jour ; à tout le moins, être suspendu ou redémarrer à zéro, toutes les informations que l'on y trouve disparaissant dans les poubelles de l'Histoire en un autodafé sans équivalent. Je ne saurais par conséquent trop vous encourager à faire une copie des textes que vous aimez, et, pour les blogueurs, que vous écrivez. Ne venez pas râler en cas de problème...

- Bibi à droite, donc. Il y a plusieurs remarques à faire. D'abord, la démarche de ces sites. Outre qu'ils ne vous consultent pas, ce qui pourrait éviter des malentendus, ils semblent pratiquer par recoupements, tant à partir des liens entrants et sortants qu'à partir des auteurs évoqués, et il est de fait que je cite plus souvent Maurras que Marx en ce moment. A ce compte, on pourrait classer des chasseurs de fachos frénétiques comme P.-A. Taguieff et C. Fourest à l'extrême-droite - ce qui d'ailleurs, dans le cas du premier, est une hypothèse que j'aimerais bien mettre à l'épreuve un jour, mais passons.




J'ai rédigé ces lignes il y a quelques jours, suivies d'autres, bavardes et vides, sans parvenir à voir d'où venait la difficulté. Simple susceptibilité de la part d'un ancien gauchiste, qui ne voudrait pas reconnaître qu'il a évolué, comme beaucoup d'autres ? Mais je suis très content d'avoir évolué, au contraire, sans que cela m'oblige à me considérer « de droite ».

En réalité (laissons là les italiques), il y avait plusieurs causes à mon embarras. Certaines sont de l'ordre de la cuisine interne et peu intéressantes pour vous. D'autres relèvent de problèmes plus généraux. Et c'est finalement la conjonction entre les petits problèmes boursiers de ces derniers jours et l'annonce par M. Cinéma qu'il allait s'efforcer de trouver une « nouvelle formule » (on se croirait à Télérama...), qui m'a permis de mieux comprendre ce sur quoi je butais.

Il me semble que nous autres blogueurs - et j'insiste sur le fait que cela ne concerne pas qu'un blogueur orienté sur la politique, même dans un sens large, comme Bibi, mais aussi un cinéphile comme M. Cinéma, voire une skyblogueuse se demandant si elle doit coucher dès le premier soir - sommes actuellement pris entre deux mouvements contradictoires.

A partir du moment où vous avez l'ambition de réfléchir à certaines questions, il arrive un jour où le support du blog, avec tous ces avantages, vous limite plus qu'il ne vous stimule. Ce n'est pas tant l'habitude de l'alimenter assez régulièrement qui vous prend du temps par rapport à d'autres travaux de fond : c'est, plus profondément, qu'à force de touiller et retouiller certaines questions, vous pouvez avoir, à la fois soudainement et non soudainement, l'impression d'approcher de quelque chose de nouveau - et vous vous sentez à l'étroit dans votre costume de blogueur. Vous devinez confusément que si vous essayez de mieux préciser les contours de ce qui vous apparaît « nouveau », vous risquez fort de vous lancer dans un travail qui, matériellement, peut très bien être publié en plusieurs épisodes sur le blog, mais qui nécessite un engagement personnel, avec ce que cela suppose en termes d'heures de travail volées à la vie familiale et conjugale, que l'on ne sent pas nécessairement à même de fournir. (Sans compter, vanitas..., que dans ce cas-là on se verrait bien publié sous la forme d'un « vrai livre », merde...)

Pour continuer avec ma métaphore habituelle du comptoir : vous êtes le patron d'un café, vous faites un peu les mêmes plats chaque jour, mais avec des variations, des nouveaux ingrédients, vous apprenez vous-même de nouvelles manières d'accorder les aliments. Et un jour, à force, il vous semble que vous n'êtes pas loin de créer une nouvelle recette vraiment intéressante. Pas loin et en même temps très loin, parce que pour être à la hauteur de ce que vous imaginez être cette idée il vous faut sinon fermer votre enseigne, du moins réduire considérablement ses horaires d'ouverture, et changer votre rythme de vie habituel.

Cela m'était déjà arrivé une fois, lorsque je travaillais à ma série sur le concept de « nature humaine », série qui, il n'y a pas de hasard, plaisait particulièrement à M. Cinéma : j'avais le sentiment de toucher à un « truc » - mais n'ai pas poussé mon avantage. Non seulement j'en ai toujours gardé une forte rancune contre moi-même, mais j'y ai appris que dans ces cas-là le train ne repasse pas : l'effort que je devrais faire aujourd'hui pour reprendre possession (presque au sens charnel d'ailleurs, on s'imprègne et on possède des concepts autant peut-être qu'on peut le faire d'une femme) de ces idées, ne serait pas impossible à fournir, mais cela me serait bien plus difficile que si j'avais alors continué sur ma lancée.

Bref ! Vous l'aurez compris, je n'ai pas envie de rater cette fois le train Simone Weil - le problème ici, par rapport aux descriptions générales que je viens de vous soumettre, étant que cette chère juive antisémite a poussé très loin la cohérence entre ses idées et son mode de vie, et que donc il ne s'agit pas seulement de jouer avec des concepts, aussi intéressants fussent-ils.

Je ne suis pas en train de vous annoncer une conversion, un départ dans le désert pour y méditer, ni même une suspension d'activité. Je n'ai aucune idée de ce que je vais faire. Mais j'ai idée, en revanche, que mes problèmes ne sont pas que les miens, d'où l'intérêt potentiel de les mettre sur la table.


D'autant que, c'est le deuxième mouvement contradictoire que je vous annonçais plus haut, il y a en ce moment, et cela nous concerne donc tous, une telle concentration d'événements (je préfère cela à « accélération de l'actualité ») que l'on se sent quelque peu impuissant à l'affronter. Ça craque de toutes parts, on le voit bien, on a de bonnes raisons de s'en réjouir, et dans le même temps on a du mal à ne pas être inquiet sur ce que cela peut donner. Je vous la fais rapide sur ce thème, le maître ou M. Defensa vous en parleront mieux que moi.

Mais le fait est là : au moment même où j'ai besoin de temps, et d'abord, sans préjudice des réponses que je peux trouver, de temps de réflexion par rapport à mes propres réflexions, je sens que les efforts qu'il faut produire par ailleurs pour comprendre à peu près ce qui se passe et, surtout, ce qui risque de se passer, sont de plus en plus grands. En poussant le raisonnement, on peut dire que ça tombe bien : puisque le support du blog ne permet ni de coller à la compréhension du monde tel qu'il se défait et se refera peut-être, ni de transmettre des idées que l'on espère être plus originales qu'à l'accoutumée, alors autant mettre la clé sous la porte, sans regret. Le blog aurait fait son temps. Mais l'on voit bien que ces idées « plus originales » ne peuvent avoir de valeur que si leur auteur a quelque « compréhension du monde » : blog ou pas blog, le problème reste entier.


Restons-en là pour aujourd'hui. Je vous laisse juges de décider à quel point les questions que j'ai exposées me concernent plus particulièrement ou sont vécues d'une manière analogue par d'autres - blogueurs ou non blogueurs, faut-il le préciser.

Et finissons avec une petite coda, dont je vous prie de ne pas surinterpréter la provenance biblique. Après le match d'hier soir, j'ai rouvert mon Nouveau Testament et suis vite retombé sur ces lignes célèbres (le mot est faible), tirées de la première Épitre aux Corinthiens, dont la thématique « maussienne » m'a frappé :

"Quant à ce que vous m'avez écrit, il est bon pour l'homme de ne pas s'attacher de femme.

Mais par crainte de la prostitution [généralisée, note de AMG], que chacun ait sa femme et chacune son mari.

Que le mari rende à la femme son dû et de même la femme, à son mari.

Ce n'est pas la femme qui a pouvoir sur son propre corps, c'est son mari ; et de même, ce n'est pas le mari qui a pouvoir sur son propre corps, c'est sa femme.

Ne vous privez pas l'un de l'autre, sinon d'un commun accord et pour un instant, pour vaquer à la prière ; et remettez-vous ensemble de peur que le Satan ne vous éprouve par votre incontinence.

Ce que je vous dis est une concession et non un ordre.

Je voudrais que tous les hommes soient comme moi, mais chacun a de Dieu son propre don : qui ceci, qui cela." (VII, 1-7)

La suite est délectable, malheureusement je ne peux la retranscrire et c'est regrettable, ça vous aurait fait lire un peu... Bref, je ne vais pas recopier tout saint Paul.

A bientôt !

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mardi 2 août 2011

Des priorités logiques et de leurs conséquences.

Un peu à la façon dont Maurras souligne avec fermeté qu'une idée n'a pas à être généreuse ou gentille, mais vraie, Evola, dans un texte écrit en 1940 ("L'Angleterre et la déchéance de l'idée d'Empire"), met utilement les points sur les i, et rappelle que l'enculisme n'est pas mauvais parce qu'il est méchant ou injuste, mais qu'il est injuste parce qu'il est faux, repose sur une conception erronée de la nature humaine (etc., cf. épisode précédent) :

"Malheureusement, la sensibilité de nos contemporains a été comme anesthésiée par le matérialisme triomphant, si bien qu'elle considère tout au plus - y étant amenée uniquement par l'instinct et par les effets de conséquences matérielles catastrophiques - qu'un monde contrôlé par la ploutocratie bourgeoise est un monde d'injustice. Mais parler d'injustice est aussi vague qu'indéterminé. C'est d'une dégradation et d'une usurpation qu'il conviendrait de parler - tout le reste n'étant que simple conséquence -, dégradation et usurpation par rapport à une conception supérieure du droit et à une légitimation plus haute de la puissance (...). Que la puissance se définisse par la richesse, par l'or, et que les nations « puissantes » ainsi conçues, sans aucun titre de supériorité, contrôlent le monde et y fassent la pluie et le beau temps - ceci est beaucoup moins une « injustice » que quelque chose d'absurde, d'anormal, d'irrationnel. C'est une situation analogue à celle d'un corps dans lequel les fonctions de la vie végétative animale, en s'hypertrophiant, tendraient à prendre la direction du tout, s'assujettissant toute autre force, toute autre faculté : il s'agit d'un phénomène purement pathologique et tératologique." (in Essais politiques, Pardès, 1988, p. 91-92)

De ce point de vue, cela est aussi clair que logique, et même d'une simplicité, c'est le cas de le dire, biblique : qui a vécu par l'enculisme périra par l'enculisme.

D'ailleurs, en cas de crise, "dans le meilleur des cas, il s'agira de combattre par désespoir, pour sauver sa peau, voire ses biens, car les démocraties ploutocratiques font songer à celui qui, placé devant l'alternative de donner sa bourse ou sa vie, préfère finalement risquer celle-ci." (Les hommes au milieu des ruines,, p. 134) - ceci est écrit en 1965.

Ces raisonnements et remarques amènent à penser que notre monde va se juger lui-même, que l'on saura à la « fin », en tout cas s'il y en a une, à quel point il était mauvais : qu'il ne parvienne pas à se redresser, à remettre les choses en ordre, que la « fatalité » de la crise l'emporte, et la messe sera dite : ce monde n'était fait que pour s'autodétruire. Ce qu'il pouvait avoir de bon étant, ce sera alors prouvé, en portion bien trop congrue par rapport à ce qu'il avait de mauvais, il n'y aura pas à le regretter.

- Le pire, ou le plus drôle, étant que tout le monde le sait et que cette crise finale, comme l'était la lutte dans le temps, cette crise, je le maintiens, est comme un « obscur objet du désir » pour nous. Ce que nous souhaitons au fond, c'est que cette crise - « systémique », pour parler comme M. Defensa - soit tellement grave qu'elle ne nous laisse plus d'excuses, de même qu'elle ne laissera pas d'échappatoire à nos « élites » usurpatrices, comme dit Evola : seul un choc d'une exceptionnelle gravité pourrait dessiller les yeux fermés par le dogmatisme et les croyances utopiques des Sarkozy et autres enculés. Les choses deviendraient tellement simples que la médiocrité intellectuelle de ceux-ci ne serait plus un obstacle : il n'y aurait de toutes façons plus le choix - donc pas de possibilité de se tromper une n-ème fois.

Tel me semble être, si l'on en juge par ce que l'on perçoit des équilibres des forces politiques et morales à l'heure actuelle, en France tout au moins, l'espèce de pari de nos contemporains : que notre monde devienne si abominable qu'il n'ait pas d'autre solution que de parvenir à se sauver. La conscience même de la nullité de ce monde autorisant à ne rien faire pour le changer : c'est un paradoxe, mais aussi un certain réalisme de ce que la « force qui va » de ce monde permet concrètement à ceux qui voudraient lutter à contre-courant : pas grand-chose. Ce que la forme de défaitisme contenue dans ledit paradoxe ne risque certes pas d'améliorer...

Reste que l'issue de ce pari - empreint de « désespoir » et non de valeurs positives, comme le notait Evola - est des plus incertaines : pour reprendre les termes du baron, il s'agit de risquer sa vie plutôt que sa bourse, en espérant que la peur alors éprouvée pour sa vie permettra (comment ?) de la sauver - et tant qu'à faire, de sauver la bourse par la même occasion - quitte à rogner un peu sur celle-ci, ce qui de toutes façons est le cours actuel des choses. Le beurre et l'argent du beurre, toujours... Ce n'est pas gagné.

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