mardi 30 octobre 2012

"Je suis parti de Bloy...

Méontologie


...qui, toute sa vie, a vénéré un Dieu absent, et plus Son absence se faisait évidente et cruelle, plus il Le vénérait. A nous d'essayer de donner une consistance à cette absence, l'incarner en somme. Le divin ne se montre jamais autant et aussi bien que lorsque Dieu apparaît dans toute Son absence. La vie est pleine de ces trous de Dieu, ces gouffres d'horreur où il est flagrant que Dieu n'est pas. Quelque chose de divin se passe quand Dieu manque. Non pas souffrir de l'absence de Dieu mais s'extasier devant cette absence comme devant un dieu. Quand on commence à comprendre que ne pas croire en Dieu et sentir Son absence sont deux choses diamétralement opposées, on est un autre homme. Apprendre à vivre avec l'absence de Dieu, Son silence et Ses signaux. Se situer par rapport à ce trou dans le monde que Dieu a fait en n'existant pas. Le reste, indifférence arrogante ou bigoterie stupide, n'a plus grand intérêt auprès de cette révélation en creux. Oui, Dieu est creux comme un tam-tam. Vivre c'est inventer un rythme sur Son dos. Dieu existe, je fais exister Dieu, je L'ai extirpé de ma gangue d'homme, je sculpte ensuite ce magma argileux, peu à peu une forme se dégage, une figure, tiens ça me ressemble, mais non, je l'ai cru mais c'est faux, ça me ressemble mais ce n'est pas moi, ça me rappelle quelqu'un, j'y suis : Jésus ! C'est là qu'on voit l'importance du Christ, Il a rempli le rôle de l'absence de Dieu. Rôle de composition il faut le dire pour un homme. Jésus-Christ incarne la divinité de l'absence de Dieu !

Il me revient une phrase de René Daumal qui disait : « Dieu je parle à ton inexistence » ; et je n'oublie pas Roger Gilbert-Lecomte qui, à la première page de son premier livre, mettait en scène Dieu et Son absence qui se saluaient. Ambassadeur divin de Dieu, incarnation terrestre de l'autoritaire néant céleste, Jésus-Christ est la preuve même que Dieu n'existe pas et pourtant j'y crois, j'y crois parce que c'est absurde.

Je me répète toute la journée comme une prière cette phrase de Tertullien : Credo quia absurdum. Quelle merveilleuse profession de foi : « Je crois parce que c'est absurde », c'est même pour ça que je crois. Si ce n'était pas absurde, il n'est même pas sûr que je croirais. Je crois d'autant plus que c'est absurde de croire. L'absurdité est mère de toutes les fois. Si croire en Dieu était logique, ce serait louche. L'irrationalité de la croyance en Dieu ne peut être vécue, et même comprise, que par l'absurde. Saint Thomas d'Aquin avait besoin de se prouver que Dieu existait, donc il en doutait. Alors que tout accepter d'emblée, d'un bloc, sans doutes, permet de croire en Son existence absente. Ce n'est raisonnablement qu'en Son inexistence qu'on peut croire à coup sûr. C'est de la folie mais pourtant je ressens au plus profond de mes fibres cette inexistence de Dieu. Exactement comme s'Il était là sous mes yeux. Je vois l'invisible. Je ne crois qu'en ce que je ne vois pas.

Saint Thomas d'Aquin remplit un trou, Tertullien le contemple." (Marc-Édouard Nabe, L'âge du Christ, pp. 16-18)

Je ne vais pas commenter ce texte, dont je me demande, globalement, jusqu'à quel point il faut le prendre au sérieux. Je ne vais pas reprocher à l'auteur ses paradoxes, m'étant moi-même demandé quelque part si « un catholique n'était pas toujours paradoxal » : disons que dans ce qui précède tout ne me paraît pas relever d'un égal degré de conviction de la part de l'auteur. Ceci, de façon générale me paraît lié, notamment, à certaines caractéristiques du catholicisme du XXe siècle, qui sont justement un des domaines d'études de L'âge du Christ, et sur lesquelles je pense et espère revenir prochainement.

Quoi qu'il en soit, cette retranscription me fournit l'occasion de corriger publiquement, à ma petite échelle, une commune erreur commise ici par M.-É. Nabe, et d'insister une nouvelle fois sur un thème qui m'est cher.

L'erreur, c'est l'attribution à Tertullien de la phrase : Credo quia absurdum. Jean Borella nous le dit :

"On ne saurait… envisager la distinction de l'Etre et du Non-Etre comme s'il y avait entre les deux une opposition de contradiction, bien que le langage semble nous y inviter. En effet, à s'en tenir aux formulations, Etre et non-Etre s'opposent comme A et non-A. Et chacun sait qu'il s'agit là de la formulation classique de ce qu'on nomme le principe de contradiction : A est A et n'est pas non-A ; ou encore : A ne peut être à la fois A et non-A ; ou encore : A et non-A s'excluent et ne peuvent être vrais en même temps. Ce principe est, selon Aristote et la philosophie en général, le plus fondamental des principes de la raison, ce qui ne souffre aucune discussion. Et précisément, si le non-Etre (l'Essence sur-ontologique ou méontologique [ici, si vous décrochez, c'est normal, nous y reviendrons plus tard, si Dieu veut…]), est conçu comme le contradictoire de l'Etre, à la manière dont non-A nie A purement et simplement, alors il y aurait en effet contradiction à affirmer que Dieu est à la fois Etre et non-Etre. Sans doute pourrait-on le soutenir au titre d'une sorte de transcendance de l'absurdité, sous le prétexte que seul un discours qui brise les exigences de la raison est à la mesure de cet au-delà de toute pensée humaine qu'est la Réalité divine, ce qui nous renverrait au trop fameux credo quia absurdum attribué faussement à Tertullien. [En note : : "L'expression ne se trouve pas telle quelle dans les écrits de Tertullien, mais on y lit des formules analogues. Dans le De Carni Christi, V, il écrit : « Le Fils de Dieu a été crucifié : je n'en suis pas scandalisé (précisément) parce que cela doit scandaliser. Et le Fils de Dieu est mort ; ce qui est parfaitement croyable (précisément) parce que c'est insensé (ineptum) ; et mis au tombeau, il a ressuscité : cela est certain (précisément) parce que c'est impossible."] Mais penser ce qui n'est pas pensable, ce n'est pas penser. Il faut donc admettre la pleine validité du principe de contradiction sur le plan de l'ontologie de la substance. Mais il n'en va plus tout à fait de même dans l'ordre méontologique, à propos duquel on peut bien parler d'un principe de non-contradiction absolue, principe qui est exigé par la pensée elle-même, et qui ne contredit nullement le principe de contradiction." (Penser l'analogie, pp. 96-97)

Encore une fois, sur cette histoire de méontologie, ne paniquez pas, et n'allez pas chez M. Google comme chez Dieu le père pour voir ce que ça veut dire : nous aborderons tout cela plus tard - lorsque je serai moi-même capable de l'expliquer à peu près clairement.

A peu près clairement, c'est d'ailleurs notre sujet du jour, et le thème que j'ai annoncé plus haut. Je le rappelais il y a peu, il m'est arrivé de critiquer la dichotomie soralienne artiste rêveur / intellectuel lucide : ce n'est pas pour retrouver une dichotomie différente mais elle aussi nuisible sous la plume de MEN. Il y a certes peut-être un moment où l'intellect, appelons ça comme ça, doit en quelque sorte lâcher prise devant « cet au-delà de toute pensée humaine qu'est la Réalité divine » ; "savoir est mieux que comprendre", vient ainsi de m'écrire M. Limbes, citant Bloy, comme on se retrouve. Mais je ne vois pas en quoi ce serait une raison pour renoncer de son propre chef à son intellect, et encore moins pour préférer ce qui a l'air irrationnel à ce qui est cohérent. Citons encore J. Borella : "'L'intelligence métaphysicienne doit s'engager concrètement dans la foi au Dieu révélé. (…) L'intelligence doit opérer une sorte de sacrificium intellectus, elle doit s'ensevelir dans la foi comme dans la mort du Christ Logos, mais c'est pour renaître avec lui." (p. 189 n.)

Dit autrement : Thomas d'Aquin ne doute absolument pas de l'existence de Dieu et sait fort bien que cette existence est plus paradoxale à certains égards que celle d'une assiette ou d'un vagin. Il ne remplit aucun trou. MEN est plus proche de la vérité lorsque, dans les lignes qui suivent le texte que j'ai cité, il parle de la Somme comme d'une "extraordinaire entreprise conçue et menée à bien pour expliquer l'inexplicable", quand bien même met-il dans les lignes en question un rien de condescendance. Quoi qu'il en soit, l'important est là : cette « entreprise » ne reflète aucun doute. Le sacrificium intellectus (encore du sacrifice, on n'en sort pas) évoqué par Jean Borella, Thomas d'Aquin l'a déjà fait, il en revient. (Ou bien tout ce que j'écris ici est complètement faux, c'est possible aussi. Mais, même complètement faux, ce sera moins faux que cette histoire de « doute ».)

Autrement dit encore, et pour finir. Peut-être est-il trompeur de parler, comme je l'ai fait, de « moment » à propos de cette façon dont l'intellect lâche prise, ou se sacrifie, peut-être cela donne-t-il un aspect trop temporel à cette idée, mais s'il y a un stade où l'intellect ne peut tout assumer, ce n'est rien une raison pour ne pas lui faire confiance, et encore moins pour le considérer comme contradictoire avec des formes éventuellement supérieures de savoir. "Si croire en Dieu était logique, ce serait louche", écrit MEN : je vois ce qu'il veut dire, mais Dieu, lui, est logique.

Sur le même thème, ou un thème très voisin, vous pouvez lire, ou relire pour les plus alcooliques de mes piliers de bar, ce texte, ou j'essaie de nuancer ce que racontent Musil et son commentateur Jacques Bouveresse sur les rapports entre science et religion, ou celui-ci, ou Simone Weil nous le dit : la science s'est écartée de la contemplation de Dieu, "non par excès, mais par insuffisance d'esprit scientifique, d'exactitude et de rigueur." - Un paradoxe pour finir, c'est de bonne guerre (sainte) : dans sa façon d'opposer Thomas d'Aquin et la proverbiale phrase attribuée à Tertullien, Marc-Édouard Nabe se montre finalement rationaliste, plus du côté de J. Bouveresse que de Simone Weil.

A suivre - encore et encore, c'est que le début, d'accord, d'accord…


Histoire cyclique de la France

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mardi 23 octobre 2012

Assez court pour un tweet, mais je préfère le dire ici.

Les identitaires sont des cons.

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dimanche 21 octobre 2012

La vérité hait le secret. Plus vous serez ouvert, plus vous serez vrai. - J'enfonce le clou (dans le cul du Président).

Où il y a de la gêne...


Il y en a qui tendent vraiment le bâton pour se faire enculer, et quand on voit le Président se réclamer de Weininger, puis se comparer à Platon et Mishima, on se dit que l'on n'avait pas tort de se poser des questions sur son hétérosexualité. Ça pue le pédé viril à vingt lieues, cette histoire. D'ailleurs, du côté de Marc-Édouard Nabe, où l'on cite le passage sur les « amisexuels » que j'évoquais la dernière fois, on n'a pas l'air de penser très différemment - rappelons pour finir, et en espérant qu'il n'y a pas ici d'homonymie trompeuse, que le Président lui-même a raconté avoir eu des rapports intimes avec Hector Obalk, évoqué par les lecteurs de Marc-Édouard Nabe.

Bon, j'arrête, parce que sinon, tapette ou pas, A. Soral va finir par me casser la gueule, et j'en reviens à des sujets plus sérieux. (Et, tout de même, je précise que ce n'est pas mal du tout cette histoire de Kontre Kulture : je n'ai pas encore eu un livre publié par E&R entre les mains, mais on ne va pas critiquer des gens qui ressortent des textes rares (au passage et en référence à une livraison précédente : contrairement à ce que disait Alain Soral, il existe une version récente en français, publiée en Suisse sauf erreur de ma part, du Juif international de Henry Ford) ou éditent des livres que personne ne veut éditer.)


Un petit mea culpa pour commencer : en évoquant L'âge du Christ la dernière fois, j'ai complètement oublié de préciser, en complément à mon appel à témoins récent, que l'auteur y parle de la prière et y prie. Ce qui ne met pas fin à toutes les questions que je me pose à ce sujet, mais, depuis cette demande d'aide aux nabiens, et plus précisément depuis la rédaction de ma dernière note, je me suis, en quelque sorte, libéré de MEN. Ce n'est pas qu'il ne m'intéresse plus ou que je n'ai pas encore beaucoup de choses à piocher chez lui, c'est que je lui en demandais trop par rapport, je ne dis pas la cohérence de son travail, mais par rapport à la facture de celui-ci. C'est toujours pareil, il ne faut pas réintroduire sans s'en rendre compte la dichotomie intellectuel sérieux / écrivain rêveur utilisée par Alain Soral contre Marc-Édouard Nabe, dichotomie que j'avais en son temps critiquée (ach, je ne retrouve pas le lien...). Mais après avoir écrit, ou en écrivant, donc, ma précédente note la semaine dernière, je me suis aperçu que je commençais moi-même, non pas vraiment à "vouloir être Nabe à la place de Nabe", mais à vouloir trop saisir les liens entre ses idées et sa personne. Ce n'est pas que le sujet n'aurait aucun intérêt, il s'en faut, c'est que ça ne m'est pas utile de m'embarquer vraiment dans cette direction.

J'en profite, puisque nous sommes à l'heure de clarifications dont vous aurez j'espère compris qu'elles ne concernent pas que moi, pour noter que, par ailleurs, il me semble maintenant avoir « digéré » le travail d'Alain Soral. Là encore, ça ne signifie pas qu'il ne m'intéresse plus, encore moins que je ne lui suis pas redevable (à cette fiotte), mais que, sauf évolution surprise de sa pensée, j'ai intégré à la fois son système et ce qui ne me plait pas dans son système.

Ce qui veut dire, ça vous fera peut-être plaisir, que je devrais moins parler de ces deux gugusses dans le futur.

- Mais enchaînons tout de même par une belle intuition de MEN, L'âge du Christ, pp. 83-87 :

"Gandhi est le plus grand chrétien depuis le Christ. (…) Trop prennent Gandhi pour une espèce de gourou écolo-cool revenu à je ne sais quelle « philosophie » naturaliste qui, exotisme aidant, renouvelle le vieux panthéisme de cette vache pas du tout sacrée qu'on appelle l'homme. Faux ! Ce n'est pas naturel de recourir à la vérité vraie et à la non-violence offensive. C'est un effort terrible sur l'immonde nature humaine. Gandhi lui-même, à la fin de sa vie, traversait de drôles d'affres, il n'était pas sûr d'avoir réussi sur lui sa révolution. Bouleversant toutes les règles de l'instinct, le gandhisme ne coule pas de source. Un échec presque certain attend celui qui encaisse les coups d'autrui ouvertement. Car tout est là. Plus de cachette ! Tout doit être fait au grand jour. La vérité hait le secret. Plus vous serez ouvert, plus vous serez vrai (Gandhi).

Je n'aime pas le terme « non-violence ». Il sent la dénégation. Bien sûr, Gandhi était violent, très violent de refuser de répondre aux coups par les coups comme le Christ le lui avait enseigné. « Tends l'autre joue » est un précepte terroriste, celui de l'homme qui veut forcer l'agresseur à réfléchir son acte et à retourner sa violence contre lui-même. L'humiliation de la victime passée à tabac par son bourreau n'est rien comparée à celle du bourreau qui, à cause de la non-défense intransigeante de sa victime, a soudain honte de la frapper. Quand la non-violence a marqué ses premiers points, elle s'adressait à des Anglais, c'est-à-dire à la pire espèce de protestants. Un autre peuple, catholique ou musulman, n'aurait jamais marché. Il fallait ces puritains british et rongés par le remords pour avoir pleinement mauvaise conscience devant l'inertie provocatrice de ces Indiens inflexibles. Gandhi est le plus violent adversaire du protestantisme. (…)

« Qu'est-ce que la vérité ? » A la question posée par Pilate à Jésus, Gandhi, deux mille ans après répond : c'est une arme. Massignon, le grand gandhien, l'a dit : la meilleure attitude est d'accepter avec douceur d'être matraqué pour Elle, d'être frappé par Elle, telle que se la figurent contre nous nos frères dans leur exaspération insensée. C'est ça ! (…)

Mal comprise, la non-défense offensive (appelée à tort non-violence) débouche sur la non-résistance passive à la Lanza del Vasto, tout juste bonne aux yogas royaux sur le plateau du Larzac pour secte para-gurdjevienne. Le gandhisme, dans sa forme politique, est plus proche des attitudes « suicidaires » des chrétiens chantant en choeur leur saint martyre en descendant dans l'arène aux lions surpris, que des néo-brahmanes ex-petits bourgeois vivant en communauté en agitant des clochettes pour la paix du monde. L'erreur de certains a été d'hindouiser les Évangiles, alors que Gandhi a évangélisé l'hindouisme. On n'imagine pas jusqu'où Gandhi allait en spiritualisant la politique, ou plus exactement en refusant de sortir du domaine spirituel, même en politique (ce qu'avait fait Jésus), prenant des positions qui semblent aberrantes aux plus larges d'esprit. Quand Gandhi envoie une lettre au maréchal Pétain pour le féliciter de capituler en 1940, ça ne fait pas de Gandhi un collabo, mais un superbe christique qui sait ce que le sacrifice veut dire et qui pense - quel bloyen lui donnerait tort ? - que la France a, grâce cette guerre, l'opportunité de devenir ce qu'elle est : la grande nation du Sacré-Coeur prête à saigner ! C'est sans se défendre que la pauvre et sainte France aurait dû se laisser envahir totalement par l'Allemagne (ce qui aurait beaucoup décontenancé Hitler-le-violent), sans tirer un seul coup de feu, en acceptant finalement la punition de sa précédente victoire si humiliante pour son ennemie pas assez aimée. Voilà peut-être pourquoi, depuis, la France est ignoble et doit souffrir : pour avoir choisi les deux voies soeurs de la collaboration et de la résistance dans lesquelles d'ailleurs elle continue de s'embourber en s'auto-culpabilisant de mille manières. Elle paye aujourd'hui sa faiblesse en bradant son âme à n'importe qui, comme pour oublier qu'elle n'a pas eu le courage de se sacrifier, dignement. Massignon remarquait que les hommes étaient prêts à se faire tuer pour faire la guerre, mais jamais pour éviter la guerre. Tant qu'une nation ne dira pas : « Me voici ! Je consens à être détruite pour le salut de l'humanité », il y aura toujours des armées. Le pouvoir a bien compris que la non-violence était le comble de l'anarchie, son point vierge absolu irradiant tous les dangers. Dans non-violence, il y a violence. Je le répète. La non-violence est la vraie violence. Jésus bouillait de violence rentrée ; même Gandhi avoue avoir du mal à réfréner ses pulsions naturelles. L'Hindou est clair et net : si vous n'êtes pas assez fort pour être non-violent alors, soyez violent, c'est toujours mieux que d'être lâche."


(Les coupures que j'ai faites ne concernent pas des passages insignifiants, mais, précisément : il faudrait les discuter, et je préfère aujourd'hui retenir ce qui me semble le moins discutable. Je me suis permis par ailleurs de corriger ce qui me semble être des coquilles.)

Évidemment, si l'on admet ces dernières idées, se pose tout de même la question de ce que l'on peut faire devant les formes sournoises de violence, américano-sionistes pour prendre un exemple au hasard - certes la France est devenue une grande braderie, plus on avance et plus nos Présidents semblent afficher des pancartes "Changement de propriétaire. Tout doit disparaître.".

Mais peut-être qu'il est trop tard pour se poser la question, et que la France a laissé passer le train. Une première fois en 14-18, en deux étapes, à la fois par le massacre de sa jeunesse (un sacrifice, mais pourquoi ?) et par ce traité de Versailles que les Français ne purent lire ; une seconde fois, donc, en ne comprenant pas que l'état dans lequel était le pays en 1939, ne pouvait, devant l'invasion allemande, aboutir qu'à une seule solution cohérente, le sacrifice. - Attention, le sacrifice, pas l'acceptation de l'ordre nazi : l'indifférence, le mépris, pas la jouissance à la fois idéologique et masochiste d'un Drieu. - Les tracas et ambiguïtés du gaullisme, lorsqu'il s'est agi de reconstruire le pays, ne font finalement que refléter le fait que, s'il était certes plus louable d'être résistant que collaborateur, avoir eu à choisir entre l'un ou l'autre était déjà un aveu de défaite, en l'occurrence spirituelle.

C'est triste à dire, au moins d'un certain point de vue, mais une des conclusions possibles d'un tel raisonnement est que seul l'Islam peut redonner un lustre à la France, que le catholicisme a raté le coche. - Si les Juifs voulaient vraiment sauver et la France et ce qu'ils appellent maintenant le monde judéo-chrétien, ils essaieraient de nous convertir tous au judaïsme !

Bref, la nature spirituelle a horreur du vide, il n'y a pas de quoi s'étonner que l'Islam vienne le remplir, ne serait-ce que momentanément. - Comme me le disait un nouveau venu à mon comptoir, c'est peut-être justement parce que le catholicisme a fini de se dépouiller de tous ou de la majorité de ses accessoires de pouvoir, parce qu'il n'est plus royal, politique, ni même social, qu'il pourra jouer un rôle purement, ou essentiellement spirituel. Nous verrons !


Apocalypse or not Apocalypse, that is the question...

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samedi 13 octobre 2012

Fume, c'est du réel...

zippy


Si le Président était présidente à l'occasion, est-ce que cela changerait quelque chose à certaines de ses analyses ? Je me faisais cette réflexion à la suite des éloges qu'Alain Soral fait des textes de son Félix Niesche, qu'il est pour le moins exagéré, et je suis gentil, de comparer à Léon Bloy - j'allais dire que celui-ci n'avait rien fait à Alain Soral, mais ce n'est peut-être pas vrai, justement. Même pour un esprit aussi enclin à admirer que le mien, les envolées de Bloy ont quelque chose d'insultant, du genre : "Je te remets à ta place, petit, tu ne seras jamais capable de faire ça, n'essaie même pas."

Vu de l'extérieur, on finit donc par se dire que F. Niesche est un pseudo pour A. Soral, ou que celui-là est le Radiguet de celui-ci. Je ne vois pas d'autre explication à cet acharnement à le « pousser » autant, le Président ayant par ailleurs le jugement critique généralement assez sûr. Il n'y a que l'orgueil ou le désir pour fausser ainsi le jugement.

Je reformule donc ma question initiale : est-ce qu'une éventuelle faiblesse homo du quinquagénaire Soral changerait quelque chose à certaines de ses analyses ? A coup sûr, ce serait amusant par rapport à la virilité exhibée, du genre "c'est moi qui pisse le plus loin", du Président, à coup sûr certains musulmans seraient décontenancés (mais ils en savent beaucoup sur l'homosexualité et son déni, les cochons), à coup sûr ça ne changerait pas tout, mais le personnage que le Président s'est bâti au fil du temps ne fait-il pas partie à quelque degré de ce qu'il dit ?

Cette question générale du rapport entre la vie d'un homme et ses idées vaut évidemment aussi pour Marc-Édouard Nabe. En lisant, récemment, L'âge du Christ, je pensais : soit l'auteur évolue au cours du temps, soit il se contredit, soit je le lis mal, soit il y a quelque chose que je n'ai jamais compris dans ce qu'il écrit. Or, le moins que l'on puisse dire, et c'est sans doute un élément important dans ma perplexité, est que dans les livres de MEN il y a circulation entre les propos de l'auteur et la façon dont il se présente.

Mais allons tout de suite au passage qui me tarabuste :

"Moi aussi j'en aurais bavé. J'en aurais bavé de ne pas avoir souffert ! Je ne vois que Dieu pour avoir créé une créature aussi peu souffrante que moi ! A trente-trois ans, je n'ai jamais si peu souffert. Je ne souffrais déjà pas beaucoup mais aujourd'hui c'est le sommet ! Rien, pas une once de douleur, pas la plus petite affliction. Tout va parfaitement bien. C'est l'année de l'extase pure ! Le délice des délices ! La béatitude absolue. Tout bonheur est ridiculisé par ma joie. Je suis en pleine forme, comme Catherine de Sienne ! Seuls les enscoutés imaginent les mystiques pataugeant dans la souffrance. Je suis sûr que Marthe Robin se régalait de ne pas sortir de son lit de « douleur » et de bouffer une hostie tous les trois ans. Quand on est dans la mystique, on n'a plus mal. Mon côté soufi m'empêche de chercher le malheur à tout prix pour justifier je ne sais quel sacrifice extorqué, par intimidation, par une Église tristement visible. On trouve encore du plaisir à se mortifier : c'est louche. Moi, je ne veux aucun plaisir, de l'extase seulement ! Dieu n'exige qu'un sacrifice : celui du Moi, c'est-à-dire de la personnalité égoïste, contente ou mécontente d'elle, de l'orgueilleux système individuel de l'homme qui organise sa vie en fonction de ses défauts et de ses qualités tout autant misérables.

Pour souffrir, il faut avoir un corps, et je n'ai pas de corps. Je n'ai qu'un sexe, je ne suis qu'un sexe. Sans le sexe, je serai [sic ?] définitivement débarrassé de tout ce qui me retient parfois hors de l'extase. On dit que je ne sacrifie rien, mais je sacrifie volontiers ma chasteté pour la Gloire du Seigneur ! Jouir - sexuellement jouir - est le meilleur moyen de ne pas déflorer l'extase par le plaisir. L'escroquerie, en matière religieuse, est de chercher dans l'extase la satisfaction que les athées trouvent dans le sexe.


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Je sais, j'ai déjà utilisé cette photo, mais il est difficile de ne pas y avoir de nouveau recours à cet instant précis.


Tous les mystiques le disent, Ibn'Arabi, saint Jean de la Croix et les autres : si le croyant trouve du plaisir dans sa pratique, il n'est plus croyant. L'âme du derviche ne se grise pas de le faire danser. La sexualité n'a rien à voir avec la spiritualité. Voilà pourquoi concentrer tout le plaisir dans le sexe, permet de ne plus en trouver du tout dans toutes les autres formes malsaines de névrose religieuse : goût immodéré du sacrifice ; prières indécentes d'imploration ; extatismes flous ; mortifications débiles… Les phénomènes charismatiques (stigmates, bilocation, inédie, nimbes, fragrance, lévitation) appartiennent davantage au folklore fantastique qu'à la mystique transcendante. L'extase est un état permanent. C'est un « don » de Dieu. On n'atteint pas l'extase, on naît dans l'extase. Pour certains, ce peut être même une croix. Il n'y a rien de très marrant à être sans cesse coupé de la réalité par l'extase. Moi, ça me ravage. Heureusement, je me suis trouvé le sexe - parfait cilice pour me ramener un peu au réel, comme une bouée qui m'empêche de me noyer totalement dans cette mer de béatitude émotionnelle aux mille vagues giclant de joie qu'est ma vie religieuse." (L'âge du Christ, Rocher, 1992, pp. 109-111)

J'ai d'abord ressenti ce texte comme une sorte d'attaque personnelle, une attaque contre mes formules fétiches : le sexe, c'est le sexe et autre chose que le sexe ; le sexe est métaphysique ; le monde tourne autour d'un axe métaphysique, dont le sexe est une des principales manifestations. Finalement, en le relisant pour le retranscrire, je constate que ce n'est pas tellement le cas. Fume, c'est du belge : Jean-Pierre Voyer, détournant cette formule à l'occasion du 11 septembre, faisait dire à Ben Laden, à l'attention du peuple américain : fume, c'est du réel. Poursuivons : suce, c'est du réel, jouis, c'est du réel. Que le sexe soit un moyen de découvrir quelque chose du réel ne l'empêche aucunement d'être métaphysique. Mais le plus beau vagin du monde ne peut donner que ce qu'il a - et c'est déjà pas mal -, il ne faut pas lui en demander plus. Clarifions par rapport au texte de MEN : une chose est de ne pas confondre sexualité et spiritualité, et à ce niveau, dans les grandes lignes je souscris à ce que je viens de retranscrire ; une autre chose est de purement et simplement renvoyer le sexe au réel, à un réel certes agréable, mais évident, prosaïque, quotidien. La réalité objective n'étant pas de nature matérielle - autre formule fétiche, ©Borella -, le sexe est bien évidemment le sexe et autre chose que le sexe. Il ne donne pas la clé, il n'est pas le mode le plus élevé de la connaissance, mais il est un mode de connaissance.

Difficile à communiquer, c'est bien le problème. De ce point de vue, on peut dire qu'il est impossible d'être nabien - alors qu'il est possible d'être soralien. Je préfère, si vous me permettez ce mot très plat, l'oeuvre de Marc-Édouard Nabe à celle d'Alain Soral, mais je me qualifierais beaucoup plus aisément - encore une fois, avec des réserves - de soralien que de nabien. Et certes il y a des nabiens, leur saint patron lui-même s'en agaçait à l'époque de la réédition du Régal par Dominique « Dilettante » Gaultier, mais le terme n'a pas de signification cohérente autre que celle d'être un fan des livres de MEN. Sinon cela revient à vouloir être Nabe à la place de Nabe, ou jouir comme Nabe à la place de Nabe.

- D'où la figure, évoquée dans Alain Zannini, de l'amisexuel :

"Ah ! Je me demandais ce que j'avais fait à la Sainte Vierge pour me retrouver toujours confronté à des amis d'une telle homosexualité symbolique… Hector, Marc, Stéphane, et tant d'autres ! Je n'ai eu que ça autour de moi ! Ceux que j'appelle les « amisexuels ». L'amisexuel pénètre dans le sexualité de son ami sans être son amant. La complicité, l'affectivité, l'intimité même ne lui suffisent pas : il veut entrer dans le désir que son ami a pour le reste du monde (et dont lui-même est exclu, par principe). La tragédie de l'amisexuel, c'est que c'est toujours l'autre qui jouit du monde et jamais lui." (p. 444)

La tragédie du nabien, c'est que c'est toujours Nabe qui jouit du monde, et jamais lui. L'auteur ne peut pas vraiment se plaindre d'être « confronté » à des amisexuels, il les a d'une certaine façon créés par son écriture et l'élaboration de son personnage littéraire.

Et les nabiennes ? Peut-être, oui, y a-t-il un sens du mot nabienne, plus intéressant que la fan énamourée qui se demande quel effet cela fait de se faire sauter par Nabe.


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A elles de répondre, je ne vais pas creuser le sujet plus avant.


- Quel sujet, d'ailleurs ? Toujours le même, essayer de comprendre quelque chose à la différence des sexes, à son statut et à son rôle dans le monde moderne, voire son rôle éventuel dans la disparition à venir de ce monde moderne - ce qu'on peut appeler Apocalypse. Les textes de MEN sont une des voies d'accès pour ce sujet, que je ne peux guère aborder qu'ainsi, par petites touches, en utilisant le travail des autres. Il faut d'ailleurs noter - ou répéter - que l'auteur de L'âge du Christ, au moins en 1992, voyait l'Apocalypse derrière nous, durant la Seconde guerre mondiale. Mais ceci - n'est certes pas une autre histoire, ni même un autre sujet (enfin, c'est la question : est-ce un autre sujet ?) -, ceci, nous y reviendrons à une autre occasion.

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mardi 2 octobre 2012

A mes amis antijuifs...

Un regard plein de vanité d'auteur, défaut dont je ne suis ma foi pas exempt, sur les statistiques de ce blog, m'a permis d'apprendre qu'un de mes textes avait été partiellement repris sur un site peu favorablement disposé envers la communauté juive.

Pourquoi pas ? Je n'ai jamais été gêné d'être repris par tel ou tel, de quelque bord politique qu'il soit, les idées sont faites pour circuler. Être encensé par quelqu'un dont je pense qu'il est un imbécile me poserait problème, mais je n'ai pas souvenir, touchons du bois, que ce me soit arrivé - même si, bien sûr, on est parfois déçu qu'un de vos lecteurs semble vous avoir si mal compris... L'animateur du site a par ailleurs eu la correction d'indiquer le lien vers mon texte.

Le hic, tout de même, c'est que le texte en question, que je considère de mon côté assez important pour le faire figurer dans ma colonne de mes "principaux textes", est nettement plus long que l'extrait qui figure sur "Mafia juive", et, surtout, que sa seconde partie, dont l'existence n'est pas évoquée par M. Mafia, apporte des nuances et des contradictions au texte très antisémite de Lucien Rebatet, qui forme la première partie - la seule reproduite. J'assume tout à fait avoir illustré les tirades de Rebatet de façon provocatrice avec des photographies de juifs contemporains assez pénibles à supporter, mais je ne voudrais pas que les lecteurs de Mafia juive se méprennent sur mon propos, ou qu'ils passent à côté d'objections qui pourraient susciter leur intérêt.

C'est, soyons clair, à leur attention que je publie cette petite mise au point, quitte à faire rire certains lecteurs, lesquels me lisent plus par amitié que par adhésion à tout ce que je peux raconter, et doivent se dire "il l'a voulu, il l'a eu". Les habitués qui ne me connaissent, ou n'ont découvert mon existence, que via ce comptoir, sont finalement je crois, et je l'espère, moins concernés par ce texte. Ils méritent néanmoins un petit clin d'oeil, ne perdons pas les bonnes habitudes - ni le goût du Dry Martini.


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