jeudi 25 août 2016

Prudence, tempérance, justice... et force.

Il fait trop chaud pour travailler, c'est la fête de Saint-Louis, ce roi qui maintint les Juifs dans certains limites et ne voulut pas que les Arabes musulmans s'emparent de terres chrétiennes, je dis ça je ne dis rien, profitons-en donc pour vous livrer quelques aperçus sur des moments de l'histoire de France, à l'aide du livre dans lequel Éric Mension-Rigaut interroge Pierre Chaunu sur la dite histoire, Baptême de Clovis, baptême de la France. De la religion d'État à la laïcité d'État (Balland, 1996). Rappelons que Pierre Chaunu était protestant - un protestant presque catholique, comme l'écrivait à peu près Paul Yonnet, et allons-y :

"A partir du début du XIIIe siècle la puissance du roi de France surclasse tous les autres monarques de la chrétienté. Sa primauté est admise comme un dogme de 1204 (annexion de la Normandie par Philippe Auguste, AMG) à 1789, à l'exception de rares moments.

- A partir des XIIe-XIIIe siècles la France devient le pays des chrétiens par excellence…

Le pays des Francs, et particulièrement le bassin parisien où la population est plus dense qu'ailleurs, devient le poids lourd, l'ossature de la chrétienté latine. La France, où vivent autour du tiers des chrétiens occidentaux, apparaît comme une sorte d'Eretz-Israël bis. Les Arabes l'ont aidée en éliminant pour un temps le concurrent possible, l'Espagne. La première croisade (1096-1099) est le signe de cette formidable montée en puissance. A partir du concile de Clermont, la « douce France », avec ses grands lieux sacrés comme Chartres et Reims, est perçue comme le royaume chrétien par excellence : les musulmans appellent les chrétiens les Franji." (p. 114)

Jeanne d'Arc : "Ce qui est extraordinaire, c'est qu'elle réconcilie toutes les France : les catholiques, car elle est canonisée en 1920 ; les protestants, pour lesquels elle incarne l'absolu de la conscience et la résistance contre toutes les autorités, en particulier celle des évêques qui la condamnent. Elle brûle sur le bûcher comme les martyrs du XVIe siècle. (…) Les révolutionnaires l'aiment car elle est une fille du peuple, qui fait la nique aux nobles et redonne du courage aux soldats. Enfin, elle est la femme, à laquelle on fait appel lorsque les hommes ne sont plus capables de se défendre. Son destin fait songer au mot de Jacqueline Pascal, la soeur de Blaise, à propos des affaires du jansénisme : « Il faut bien que les filles aient un courage d'évêque puisque les évêques ont un courage de fille »… En même temps, elle n'a pas la haine de l'adversaire ; elle soigne l'ennemi blessé et pleure sa mort. Elle combat les Anglais, mais sans les détester, comme en témoignent ses propos lors du procès. Quand on lui demande si Dieu aime les Anglais, « oui, répond-elle, mais chez eux, en Angleterre… »." (p. 134)

" - Quelle est la place des catholiques en France au XIXe siècle ?

Même diminuée, l'Église de France continue à occuper la première place dans la chrétienté. Durant tout le XIXe siècle, les catholiques français sont extrêmement généreux envers l'Église. En l'espace de quelques décennies ils reconstituent ses biens par leurs dons, ce qui explique que la loi de Séparation de 1905 ait été considérée par eux, à juste raison, comme une spoliation supplémentaire, un acte de brigandage : elle confisque, en effet, les dons, faits exclusivement par les catholiques et non pas des biens dont on pouvait dire qu'ils appartenaient à la France entière, comme sous l'Ancien Régime." (pp. 280-81) - Un sale coup de la franc-maçonnerie, pour changer. Je n'ai pas souvenir que dans le livre qui était au programme lorsque j'étais en khâgne, La République radicale (Madeleine Rebérioux, 1975), l'auteur, futur présidente de la pour le moins maçonnique Ligue des Droits de l'Homme, se soit beaucoup épanchée sur ce racket d'État. - Continuons, avec la Grande Guerre - et les maçons, on n'y échappe pas :

"Aucun pays n'accepte un sacrifice aussi total. Les pertes de la guerre sont terribles : 1,4 million de morts, doublés de presque autant de mutilés. L'ampleur des pertes aurait du aboutir à l'effondrement de la France. Exsangue, elle se cramponne et tient comme les cuirassiers de Reichshoffen en 1870. C'est d'autant plus étonnant que les généraux incapables nommés par le général André (plus tard remplacés par des généraux catholiques, plus compétents, écartés avant la guerre pour des raisons politiques) commettent en 1914 et 1915 des erreurs énormes qui expliquent que 75% des pertes françaises ont lieu en 1914 et 1915 alors que les pertes allemandes se produisent surtout vers la fin de la guerre. Ce sacrifice prodigieux étonne le monde. (…) La Grande Guerre provoque une trêve intérieure. Pour s'en apercevoir, il suffit de regarder la composition du haut-commandement français en 1914 et 1918. A la fin de la guerre, l'état-major français est celui de « l'armée catholique et royale ». Beaucoup de généraux républicains, qui avant la guerre ont été poussés par les loges maçonniques, sont limogés par Joffre (franc-maçon mais patriote) au mois d'août et septembre 1914 pour incompétence notoire (…). L'origine démographique et sociale des soldats tués est éloquente. Ils appartiennent en plus grand nombre, proportionnellement, à la France catholique, féconde et rurale : la Bretagne, alors très pratiquante, subit les plus lourdes pertes." (p. 290-91)

" - Le sacrifice de la Grande Guerre provoque un culte des morts d'une ampleur exceptionnelle… Oui, à partir de 1914-1915, se développe une religion centrée sur le culte des morts, inséparable de l'amour sacré du sol de la patrie. Spectaculaire dans l'est de la France, où l'on construit de gigantesques nécropoles, le culte des morts rappelle l'époque des mégalithes. (…) Le culte des morts s'explique parce que les laïcs revivent l'Antiquité : « Passant, va dire à Sparte que ses fils sont morts pour obéir à ses lois… » C'est très net dans les discours de Clemenceau expliquant que les morts ont des droits sur les vivants." (pp. 294-295)


C'est en ce point que je me sépare quelque peu de Pierre Chaunu, qui ne semble pas s'inquiéter de tout ce que ce culte des morts comporte de retour au paganisme. Les Français, dit-il dans certains passages, se réconcilient autour de la France comme une « terre sacrée » : pendant la guerre 1914-1918, cela les certes a aidés à s'unir, mais ce concept est fourre-tout et ambigu - surtout s'il est récupéré par un vieux renard franc-maçon comme Clemenceau, le même Clemenceau qui fit ce qu'il put dans l'après-guerre pour éviter que ne se redresse le catholique et mal en point Empire austro-hongrois, lequel nous aurait été pourtant utile dans les années 30 pour lutter contre Hitler.

- Ne partons pas dans tous les sens. Répétons simplement, j'ai déjà eu l'occasion de l'écrire, que le christianisme et son « Laissez les morts enterrer les morts » est nettement plus tourné vers l'avenir, je n'ose écrire progressiste, que toutes les formes de culte des morts, et leurs variantes poussant à la repentance ad vitam aeternam, c'est le cas de le dire, qui débouchent sur diverses formes de mélancolie maladive et de castration ou d'auto-castration.


N'ayant pas de conclusion à apporter à cette suite de citations, je me permets de vous rappeler que j'ai abordé des questions analogues, au cours d'une série appelée "Apologie de la race française", en référence aux éclaircissements de Paul Yonnet sur cette notion de race française, série qui démarre ici, et dans laquelle, si ma mémoire ne me trahit pas, on croise déjà Pierre Chaunu. Je ne l'ai pas encore relue. Il se peut qu'elle soit grevée par mon incompréhension de la portée de la haine que les Arabes musulmans dans leur majorité portent à la France et aux Franji. Depuis, ces messieurs ont eu la bonté de mettre fin au malentendu. (Et s'ils disent qu'ils aiment la France, c'est comme les Anglais l'aiment, parce qu'elle est belle et qu'il y a la Sécu : ils attendent qu'elle soit musulmane pour se mettre à l'aimer sans réserve. C'est humain, je dois dire. Les moyens pour y arriver apparaissent à l'observateur objectif moins humains.)