samedi 31 mars 2018

Les hommes politiques vus par Paul Valéry.

Je ne sais en réalité à qui il pensait, mais l’image d’un F. Hollande m’est spontanément venue à l’esprit en lisant cette phrase. Après quoi il suffit de généraliser : 


"Les médiocres esprits deviennent toujours plus habiles, ne cessant de parcourir le même lieu."

vendredi 30 mars 2018

Vendredi saint pour ceux qui ont la foi.

"Console-toi, tu ne me chercherais pas si tu ne m'avais pas trouvé."

jeudi 29 mars 2018

Tu honoreras ton père et ta mère...

Ma foi, je n’ai pas grand-chose à ajouter à ce texte (http://www.lamanifpourtous.fr/les-chroniques/chronique-parent-1-parent-2-cathares-de-retour/) sur une mesure aussi ignoble que ridicule : 

"Il n’y aura plus, ni « père », ni « mère », à la mairie de Paris. Voilà ce que les conseillers de Paris ont voté il y a quelques jours pour les formulaires de demandes d’état civil. A la place ? « Parent 1 », « Parent 2 ».

Pourtant, en 2013, lors des débats sur la loi autorisant le mariage de deux personnes du même sexe, Christiane Taubira et la majorité socialiste avaient juré, suite aux alertes de La Manif Pour Tous, que jamais, ô grand jamais, cela n’arriverait.

Les élus l’ont voté au nom de la lutte contre la discrimination à l’égard des parents de même sexe. Mais qu’en est-il des couples homme-femme : ne sont-ils pas eux-mêmes niés, voire insultés, de ne plus être reconnus comme père et mère, mais qualifiés de parents 1 et 2 ? Qu’est-ce qu’un « parent 1 » ou « parent 2 » ?

Demain, à Paris, 99% des couples se verront imposer un formulaire travestissant la réalité, à savoir qu’un enfant naît toujours d’un père et d’une mère. Prétendre le contraire, c’est se ranger dans le camp des individus qui disent que la terre est plate et que Napoléon n’a jamais existé.

Conçue par les idéologues du genre niant la différence homme-femme et du même coup la différence père-mère, réinventant le monde à l’aune de leur utopie, la loi Taubira entraîne à sa suite la déconstruction de la filiation et du droit de la famille.

Demain, les enfants parisiens liront sur leurs actes d’état-civil qu’ils sont nés d’un « parent 1 » et d’un « parent 2 ». Ils se demanderont pourquoi leur mère n’est pas reconnue comme mère et leur père comme père, qu’est-ce que cela signifie, quelle raison a pu justifier une telle décision. Ils découvriront une époque au cours de laquelle des groupes d’hommes et de femmes, niant la dimension charnelle de leur être et tout ce qu’elle implique, militaient pour une nouvelle croyance dans laquelle le corps n’avait ni sens, ni signification, ni importance, où il n’était qu’une chose, déconnecté du psychisme, de l’affectif, du culturel.

Ayant la foi des convertis et animés par la violence de ceux qui détiennent une nouvelle « vérité », ces enfants rapprocheront cette idéologie de la foi des cathares, qui, au Moyen-âge, voyaient le corps comme une prison. Comme eux, ces néo-cathares veulent que nous soyons « purs » de notre réalité, de nos origines. Pour cela, plus d’identité sexuelle, plus de père ni de mère, plus de maternité, ni de paternité : uniquement la parentalité et des parents 1 et 2 (en attendant les 3 et 4 ?)

Tuer le père, tuer la mère, transformer les hommes et les femmes en les fondant dans une humanité asexuée."


Si l’on s’étonne parfois que les mouvements dits progressistes soient en ce moment aussi puritains, je pense que la piste cathare ici évoquée est pertinente : il y a un moment où l’idéologie LGBT ne fait plus que nier la réalité des corps. Exactement comme ceux qui nient l’existence des besoins et désirs sexuels. On n’ajoutera pas, pour filer la métaphore cathare, le célèbre mot attribué à Simon de Montfort, "Tuez-les tous, Dieu reconnaîtra les siens.". On se contentera d’une version moderne soft : crevez dans votre merde spirituelle - mais arrêtez de nous faire chier. 

mercredi 28 mars 2018

Tu ne tueras point...

Je n’avais pas du tout prévu - au contraire, dirais-je même - d’évoquer feu Arnaud Beltrame, je tombe sur ces lignes de Jean Madiran, disons qu’elles seront ma modeste contribution au choeur en cours. J. Madiran évoque un évêque, qu’il a manifestement dans le nez, et qui se vante, en 1969, d’avoir tué quatre Allemands pendant « la guerre » - ceci sans plus de précisions, et alors qu’il était déjà dans les ordres. Commentaire de J. M. : 

"On complètera le propos de Mgr Boillon en supposant avec bienveillance, et je l’espère avec vraisemblance, que les quatre Allemands tués par Mgr l’évêque étaient des soldats, et qu’ils ont été tués en combat. Cela va sans dire dans le cas d’un tel évêque ? Mais cela ne va pas sans dire quand justement on est occupé à enseigner la morale, et il est dommage que [l’intéressé] omette de le préciser, invoquant seulement « la guerre » en général, comme s’il allait de soi qu’en temps de guerre le Ve commandement du Décalogue se trouve universellement suspendu. Or il ne l’est point. Il garde au contraire toute sa force, ou devrait la garder. Qu’il y ait la guerre n’autorise pas à tuer purement et simplement, ni n’importe qui ou n’importe quand. L’état de guerre n’autorise pas à tuer les non-combattants, ni même les combattants quand ils sont, précisément, hors de combat : désarmés, blessés ou prisonniers. D’ailleurs la guerre, pour les chrétiens, et même pour beaucoup d’autres, ne consiste pas principalement à tuer, mais plutôt à être tué. Nous ne savons pas combien Péguy a tué d’Allemands en 1914, ni même s’il en a tué un seul : nous savons comment il a été tué. Le métier militaire est celui où on fait d’avance le sacrifice de sa vie, et non pas celui où l’on collectionne les cadavres recensés de ses ennemis trucidés. La grandeur et l’honneur de ce métier viennent de ce qu’essentiellement on peut y recevoir en service commandé la mort à tout instant, et non de ce qu’accidentellement on peut être en situation de la donner. Ni le métier militaire ni la guerre ne sont soustraits au Ve Commandement."

Précisons, pour un point de détail, que l’adverbe accidentellement a ici une connotation aristotélicienne ; pour une généralité, que ces belles considérations ne sont ni défaitistes ni lâches, encore moins masochistes. Et encore moins masochistes pour les autres - sur le thème "Vous n’aurez pas ma haine", ou "Les djihadistes peuvent revenir en France"... : Popu paiera encore les pots cassés de la lâcheté et la pusillanimité de nos hommes politiques, qui lui font tendre l’autre joue (je reste poli par déférence envers le texte biblique…) quand il s’est déjà pris une grosse baffe. Mais eux, pleins de bonnes paroles sans le moindre amalgame, continuent à manier la trique à notre égard et à nous maintenir à genoux. - Bref, ce sont de vrais enculés, si vous me lisez vous le savez comme moi, et à demain.  

mardi 27 mars 2018

Une si petite bagatelle (pour un massacre ?)...

Je l’ignorais, dans ses Mémoires Saint-Simon évoque Voltaire, qu’il se trouve avoir quelque peu connu pour des raisons qui n’ont rien à voir avec la littérature. "Il y a des temps où l'on ne doit dépenser le mépris qu'avec économie, à cause du grand nombre de nécessiteux.", écrivait un autre mémorialiste d’outre-tombe, Chateaubriand. A lire ces quelques lignes qui semblent osciller entre dédain, mépris et indifférence, on se dit que Saint-Simon a écouté le conseil de successeur et qu’il fait montre ici d’un noble souci d’économie : 


"Arouet, fils d’un notaire, qui l’a été de mon père et de moi jusqu’à sa mort, fut exilé et envoyé à Tulle pour des vers fort satiriques et fort impudents. Je ne m’amuserais pas à marquer une si petite bagatelle, si ce même Arouet, devenu grand poète et académicien sous le nom de Voltaire, n’était devenu à travers force aventures tragiques une manière de personnage dans la république des lettres, et même une manière d’important parmi un certain monde."

lundi 26 mars 2018

Le Grand Remplacement ne vient pas seulement de l'étranger. "Une espèce d’homme essentiellement supranationale et nomade..."

Un peu de Nietzsche, pourquoi pas ? 

"Qu’on appelle « civilisation » ou « humanisation » ou « progrès » ce qui apparaît aujourd’hui comme la caractéristique de l’Européen ; qu’on l’appelle simplement, sans éloge ni blâme, d’une formule politique, le mouvement démocratique de l’Europe : derrière les scènes politiques et morales que désignent ces formules, s’accomplit un immense processus physiologique de plus en plus rapide : les Européens commencent à se ressembler, ils se libèrent progressivement des conditions qui font naître des races prisonnières du climat et des classes sociales ; ils s’affranchissent toujours davantage de tout milieu défini qui pourrait au cours des siècles imposer à l’âme et au corps des exigences identiques. Ce qui s’accomplit, c’est donc le lent avènement d’une espèce d’homme essentiellement supranationale et nomade et qui, physiologiquement, possède comme caractère distinctif et typique un maximum de don et de puissance d’adaptation. Ce processus d’« européanisation » verra peut-être son rythme retardé par de grandes rechutes, mais il y gagnera sans doute en véhémence et en profondeur - l’impétueuse poussée du « sentiment national » qiu fait encore rage actuellement est une des ces rechutes, tout comme la montée de l’anarchisme -, et il aboutira probablement à des résultats qu’étaient très loin d’attendre ses naïfs promoteurs et panégyristes, les apôtres des « idées modernes ». Les mêmes conditions nouvelles qui déterminent en moyenne le nivellement de l’homme, - ravalé au rang d’animal grégaire utile, laborieux, utilisable à toutes fins, et jamais en défaut, - sont aussi éminemment propices à donner naissance à des hommes d’exception du genre le plus dangereux et le plus séduisant. En effet, alors que la force d’adaptation, qui se trouve en face de conditions toujours changeantes et doit recommencer à chaque génération et presque tous les dix ans un nouveau travail, ne permet pas au type humain de s’affirmer avec puissance ;  alors que l’impression générale que feront ces Européens de l’avenir sera probablement celle de travailleurs à tout faire, bavards, faibles de volonté et extrêmement adaptables, qui ont besoin du maître, de celui qui commande, comme du pain quotidien ["En tant que révolutionnaires, vous êtes des hystériques qui réclament un nouveau maître. Vous en aurez un", disait le maurrassien Lacan aux gauchistes en 1968. Eux et leurs enfants ont Macron.] ; alors que la démocratisation de l’Europe tendra à produire un type d’hommes préparés à l’esclavage au sens le plus raffiné du mot - dans certains cas isolés, l’homme fort connaîtra des réussites exceptionnelles et deviendra plus fort et plus riche qu’il ne l’a jamais été jusqu’ici, - grâce à l’absence de préjugés de son éducation, grâce à l’infinie multiplicité de ses exercices, de ses talents, de ses masques. Je voulais dire : la démocratisation de l’Europe nous prépare du même coup et très involontairement une pépinière de tyrans, - dans tous les acceptions du mot, même la plus spirituelle."

Par-delà la fascination toujours un peu équivoque du futur-fou moustachu pour la force, ce texte rappelle, en somme, que pour être remplacé, il faut être remplaçable, et que la modernité avait déjà commencé, il y a plus d’un siècle, à standardiser les Européens - jusqu’au premier climax de la boucherie héroïque (Nietzsche aimait Voltaire, citons-le…) de 14-18. Et à l’abattoir (pas encore hallal), tout le monde se ressemble. 


Ceci étant, pour finir sur une note plus positive, les jeunes qu’il m’arrive de croiser dans mon métier, à leur modeste échelle, peuvent confirmer une des prédictions de Nietzsche : moins psycho-rigides que les jeunes de mon époque, bibi compris, curieux de beaucoup de choses, absolument pas dupes des conneries qui ont bercé toutes les générations depuis les années 60, ils me permettent d’être un peu moins vieux con. Arrivent-ils trop tard, sont-ils assez nombreux, c’est une autre question.

dimanche 25 mars 2018

Liberté, égalité, fraternité.



Un petit florilège aujourd’hui, on essaiera de faire plus dense dans les jours à venir : 

"Il suffit de croire à la liberté pour perdre son indépendance." (T. Ungerer)

"L’idéal moderne, c’est de faire de sa vie ce qu’on veut. En réalité, c’est ce qu’on fait quand il n’y a pas d’autres solution." (J. Baudrillard)

"L’égalité devant la loi ne prouve qu’une chose, c’est qu’il n’y en a pas d’autre." (J. Barbey d’Aurevilly)

"La démocratie ? Savez-vous ce que c’est ? Le pouvoir pour les poux de manger les lions." (G. Clemenceau)

"Le hasard est l’alibi des imbéciles." (G. Bernanos)


"Ils deviennent fous, mais ils restent cons." (J. Torma)




samedi 24 mars 2018

"Ne vous excusez pas, c'est un signe de faiblesse."

John Wayne, dans l'admirable Charge héroïque (She wore a yellow ribbon), de John Ford.

J'avais prévu de citer Nietzsche (eh oui, tout arrive), mais je découvre que la piquante Eugénie Bastié s'excuse auprès de ceux qu'elle a blessés (avec un s, si je puis me permettre) du fait de son "tweet imbécile" qu'elle "regrette profondément". N'ayant jamais eu à affronter une tempête sur Twitter, je ne vais pas en rajouter, mais il est regrettable de courber l'échine pour un tweet aussi réussi que :

"Ne jugeons pas trop vite cet homme en héros, il a peut-être mis des mains aux fesses à Saint-Cyr."

C'était pourtant un joli hommage à A. Beltrame, en même temps qu'un sain rappel de certaines priorités : il est plus important pour un militaire de prendre des risques et de risquer sa vie que d'être d'une parfaite galanterie à Saint-Cyr. Ou, de l'autre point de vue, et puisqu'il faut apparemment rappeler toutes les évidences : un terroriste islamiste est plus dangereux qu'un bourrin bizuteur d'une école militaire.

Mais le fond du problème, au-delà de cette affaire désagréable pour l'intéressée mais anecdotique, c'est le statut de l'ironie. Il faudrait s'excuser d'avoir de l'esprit, maintenant... Encore une fois, je peux comprendre que lorsque l'on se retrouve dans l'oeil du cyclone on veuille d'abord et avant tout en sortir, mais si les gens intelligents commencent à s'agenouiller devant les imbéciles et à accepter que ceux-ci ne comprennent pas leur intelligence, nous ne sommes pas sortis de l'auberge. Citons donc pour conclure ce bref billet deux présidents de la République, respectivement russe et français : "Il faudrait buter les cons jusque dans les chiottes". - "Vaste programme !"

vendredi 23 mars 2018

Hommage à J. Kessel. (Suite à une bonne interview de J.-Y. Le Gallou dans "Éléments".)




"Ami, entends-tu le cri sourd du pays qu'on enchaîne..."

jeudi 22 mars 2018

"L'expérience fait voir..."

Bossuet, en avertissement au catéchisme publié par son diocèse de Meaux en 1686 - c’est dire si à tous points de vue il aurait mérité d’être mis dans la fosse commune en 1793… -, énonce des principes qui ne valent pas que pour l’éducation surnaturelle (qui est celle dispensée par le catéchisme) - même s’il est difficile de démêler ici la théorie pédagogique, le souci du salut des enfants à qui ce catéchisme était destiné, et la beauté de la langue de la fille aînée de l’Église :  


"Si vous trouvez dans ce catéchisme des choses qui semblent surpasser la capacité des enfants, vous ne devez pas pour cela vous lasser de les leur faire apprendre, parce que l’expérience fait voir que, pourvu que ces choses leur soient expliquées en termes courts et précis, quoique ces termes ne soient pas toujours entendus d’abord, peu à peu en les méditant, on en acquiert l’intelligence ; joint que, regardant au salut de tous, nous avons mieux aimé que les moins avancés et les moins capables trouvassent des choses qu’ils n’entendissent pas, que de priver les autres de ce qu’ils seraient capables d’entendre."

mercredi 21 mars 2018

"Il n'y a rien à profaner."

"Mais il n'y a rien à profaner. On a tout mis à la fosse commune en 1793. L'enjeu est aujourd'hui de trouver un lieu refuge pour des personnes qui ont fui la guerre et la misère."

"En appelant des #migrants à profaner la Basilique Saint-Denis, nécropole de nos rois, "La France Insoumise" et l’extrême-gauche démontrent que, dans leur folie immigrationniste, ils sont prêts à piétiner notre civilisation et à profaner un lieu de culte historique. Indigne."

Marine Le Pen, à tort ou à raison, a utilisé le verbe « profaner » au sujet de l'action commune d'étrangers et de membres de la France insoumise à la Basilique Saint-Denis. A quel point, sur Twitter, a-t-elle réfléchi avant d’utiliser ce vocable, je l’ignore, mais il n’est pas indifférent de remarquer que ce terme est depuis vingt ou trente ans - notamment depuis l’affaire de Carpentras, en 1990, elle avait alors 22 ans et son père s’était alors retrouvé malgré lui aux premières loges, il est aisé d’imaginer qu’elle ait pu s’en trouver marquée - réservé, dans notre République en manque de sacré, aux attaques contre les sépultures juives. Des tombes chrétiennes seront « dégradées », des tombes juives sont « profanées ». Dans la Ferme des animaux d’Orwell tous les animaux sont égaux mais certains plus égaux que d’autres ; dans la laïcité républicaine, la religion est censée être une affaire privée, mais certains ont encore droit au sacré public - en leur qualité de victimes pour une grande part. 

(Peut-être est-ce là une des causes du masochisme européen actuel : si seules les victimes ont droit à la considération, alors sacrifions nous nous-mêmes pour être des victimes, pour être à nouveau estimés… par qui ? Par nous-mêmes ? Voilà bien une dérisoire pulsion d’orgueil - et une forme subtile quoique grotesque de paternalisme. Par ceux qui profitent de notre masochisme ? Ils auraient bien tort de ne pas nous prendre pour les cons (bizarrement, le sens étymologique me revient soudainement à l’esprit…) que nous sommes.)

Bref, Marine Le Pen a eu du nez en utilisant ce terme (excessif ou non en l’espèce, ce n’est pas la question). Et Clémentine Autain, en commençant sa réponse par "Mais il y a rien à profaner", formule magnifique à de nombreux égards, est d’une sincérité que l’on ne peut que louer. Elle ne voit clairement pas qu’il puisse y avoir quelque chose à profaner à la Basilique Saint-Denis. De toutes façons, ajoute-t-elle, "On a tout mis à la fosse commune en 1793." Provocation, bêtise pure, manque de culture, réflexe gaucho-génocidaire ? Ce n’est qu’un tweet, ne partons pas dans une analyse trop pointue et nécessairement spéculative des motivations de cette si sympathique militante. Au surplus, l’argument qu’elle utilise juste après cette saillie n’est en bonne logique pas stupide : on peut effectivement considérer que sauver des vies humaines « de la guerre et de la misère » est plus important, au moins en situation d’urgence, que de se soucier des tombes qui se trouvent à l’endroit où l’on peut sauver ces victimes qui cherchent un « refuge »

Le premier problème, c’est que les étrangers (refusez le terme migrant !) que l’on voit sur les images des incidents de la Basilique Saint-Denis n’ont pas précisément l’air d’être à l’article de la mort. Ont-ils même fui « la guerre et de la misère », cela reste à prouver. "Si ce n’est toi, c’est donc ton frère" : il y a chez les esprits militants comme Clémentine Autain, lorsqu’on émet des objections de ce genre, une bizarre inversion de l’attitude du loup dans la fable de La Fontaine (un homme d’avant 1793, horresco referens…) - si ces gens-là ne sont pas vraiment en danger, ou ne sont pas vraiment ce que j’aimerais qu’ils soient (pour avoir une bonne image de moi-même, encore une fois), ce n’est pas grave, il y en a d’autres, quelque part, qui sont comme ça, en attendant ceux-ci font l’affaire. Si eux ne crèvent pas la dalle, d’autres, oui, je ne vais pas chercher plus loin. Le loup cherche un coupable (parce qu’il a faim), Clémentin Autain cherche des victimes (parce qu’elle a faim d’estime d’elle-même ?),  "sans autre forme de procès" dans les deux cas. Un peu d’étymologie souligne que cette nouvelle allusion à La Fontaine n’est pas sans fondement : "Provenç. proces, avancement et procès ; espagn. proceso ; ital. processo ; du lat. processus, action de s'avancer, apophyse, progrès, avancement, de processum, supin de procedere, procéder" (30 secondes de Google, ce n’est pas dur). Il ne faut pas mettre la charrue de la pitié avant les boeufs de l’intelligence, il faut procéder pas à pas, recourir à des « formes de procès », histoire de vérifier, dans la mesure du possible et sans être policier, je veux bien, mais en utilisant ses yeux, son cerveau et son expérience, de vérifier à qui l’on a affaire. Mais il est vrai qu’il est plus simple de "tout mettre à la fosse commune", comme en 1793. 

Le deuxième problème est plutôt une ambiguïté. Il y a évidemment du sacré pour Clémentine Autain. La souffrance des pauvres, par exemple. Là encore, elle n’a pas tort. Mais sans aller jusqu’à lui conseiller de lire Léon Bloy, pour qui cette souffrance était sacrée et qui a écrit des pages bouleversantes à ce sujet, mais qui a cru qu’« on » n’avait pas tout mis à la fosse commune en 1793, notamment pas Louis XVII, sans lui faire des suggestions aussi évidemment grotesques par rapport à sa vision du monde, on aimerait qu’elle s’interroge sur le pourquoi de cette sacralité, sur le pourquoi de son engagement. Son tweet peut être lu comme un assemblage de naïveté, de bêtise et de haine, mais elle n’en est pas moins ardente à défendre certains combats, et depuis longtemps. Vous me voyez venir : c’est un vieux fond de christianisme qui s’agite en elle, le monde est plein d’idées chrétiennes devenues folles, etc. Tout à fait, mais si l’on veut relever (comme on relève le goût d’une sauce) ces idées qui peut-être ne s’appliquent pas à exactement à la personnalité de Clémentine Autain, il faut à la fois revenir au début de ce texte et élargir le débat. Un esprit religieux - chrétien, juif, musulman, etc. - sait ce qui est sacré et ce qui ne l’est pas, et a au moins une idée des raisons pour lesquelles ceci ou cela est ou n’est pas sacré. (Si c’est de moins en moins vrai des chrétiens, tant pis pour eux…). Un esprit républicain sanctifie d’autant plus les « valeurs »  avec lesquelles il nous casse les couilles (avant de nous mettre en tôle ?) qu’il ne sait pas les définir, et nous sert une tambouille où le sacré, le laïque, le conformisme et la volonté d’être anticonformiste (Baudelaire (ou Tocqueville ? googlez…) appelait cela "l’originalité banale") pataugent sur fond de schizophrénie et d’agressivité péremptoire. 


Il n’est pas sûr d’ailleurs que Marine Le Pen ait les idées beaucoup plus claires sur ce sujet (sa nièce, en revanche…). Mais si j’élargis le propos, je vais me laisser aller à des considérations anti-républicaines que certes la logique appelle, ce n’est pas Maurras qui me contredira, mais qui ne sont pas toujours bien prises par les républicains - le même Maurras a goûté la prison du pays des Droits de l’Homme avant comme après la Seconde Guerre mondiale, rappelons-le…

mardi 20 mars 2018

Hommage indirect à V. Poutine...

Feuilletant un livre sur les guerres franco-allemandes (écrit avant la troisième, celle de 1939-45, que l'auteur sent néanmoins venir, et bien sûr avant la quatrième, l'actuelle, économique), j'apprends qu'en 1848 Lamartine écrivait déjà : "L'unité de l'Allemagne serait la crise incessante et le danger de mort perpétuel de la France." - La grande Allemagne est trop grande pour la France et pour l'Europe, elle est tellement grande qu'elle se sent à l'étroit en Europe. De Bismarck à Merkel en passant par Hitler, cela n'a jamais changé.

lundi 19 mars 2018

"L'épais génie des aises physiques..."

Je ferai plus charnu sous peu j’espère, je me contente de recopier ce soir - mais pas n’importe quoi, le début de L’Ensorcelée, avec quelques tournures fortes de Barbey : 

"Qui ne sait le charme des landes ?… Il n’y a peut-être que les paysages maritimes, la mer et ses grèves, qui aient un caractère aussi expressif et qui vous émeuvent davantage. Elles sont comme les lambeaux, laissés sur le sol, d’une poésie primitive et sauvage que la main et la herse de l’homme ont déchirée. Haillons sacrés qui disparaîtront au premier jour sous le souffle de l’industrialisme moderne ; car notre époque, grossièrement matérialiste et utilitaire, a pour prétention de faire disparaître toute espèce de friche et de broussailles aussi bien du globe que de l’âme humaine. Asservie aux idées de rapport, la société, cette vieille ménagère qui n’a plus de jeune que ses besoins et qui radote de ses lumières, ne comprend pas plus les divines ignorances de l’esprit, cette poésie de l’âme qu’elle veut échanger contre de malheureuses connaissances toujours incomplètes, qu’elle n’admet la poésie des yeux, cachée et visible sous l’apparente inutilité des choses. Pour peu que cet effroyable mouvement de la pensée moderne continue, nous n’aurons plus, dans quelques années, un pauvre bout de lande où l’imagination puisse poser son pied pour rêver, comme le héron sur une de ses pattes. Alors, sous ce règne de l’épais génie des aises physiques qu’on prend pour de la civilisation et du progrès, il n’y aura ni ruines, ni mendiants, ni terres vagues, ni superstitions comme celles qui vont faire le sujet de cette histoire, si la sagesse de notre temps veut bien nous permettre de la raconter."

dimanche 18 mars 2018

Aux origines de l'islamo-gauchisme...

Suite immédiate du précédent - mon titre sollicite un peu ce texte, mais c'est pour donner des pistes : 

"Rien de grand dans l’histoire ne s’est accompli sans lui [le pessimisme], et le Christianisme doit sans doute la vigueur de son énergie conquérante à la doctrine du péché originel, comme il doit sa décadence aux compromissions avec les idéologies optimistes qui ont contaminé son histoire depuis l’avènement du rationalisme. L’optimisme est au contraire la nourriture fade qui convient aux âmes faibles, avides d’espoirs décevants, et qui, tissant par impuissance et par compensation les rêves où ils se réfugient, protestent contre le réel et et fomentent sans cesse contre lui les insurrections désespérées de l’utopie et de la haine. Par là aussi, le pessimisme pratique, principe de l’ethos, s’oppose au pessimisme théorique qui, abandonnant l’homme à la Fatalité [Inch Allah ?…], rejoint son adversaire dans la cruauté et dans l’anarchie."

A la vérité, le « pessimisme théorique » est une évocation du protestantisme - il ne me semble d’ailleurs pas que l’Islam soit une religion singulièrement pessimiste (elle est conquérante en revanche, et de ce point de vue n’entre pas dans le schéma de Marcel de Corte). Mais pour ce qui est de « la cruauté et l’anarchie », là… 

Je me permets par ailleurs de signaler que j'avais cité il y a deux ans un beau texte de Bonnard sur l'optimisme : http://cafeducommerce.blogspot.fr/2016/01/au-bonnard-du-jour-iv-dieu-et-mon.html

samedi 17 mars 2018

"Une nouvelle chevalerie naîtra..."

C'est le titre d'un beau livre de Jean Madiran, publié quelques années après ces lignes : 

"La vie humaine est une tragédie : tragédie de la défaite et de l’abandon aux puissances maléfiques, tragédie d’une victoire sur elles qui ne peut se maintenir, en présence d’un mal poussant toujours sa pointe, qu’au prix d’une vigilance continue. Les moeurs saines qui supposent une moralité élevée ou simplement moyenne et qui veillent sans faiblir sur l’homme, sont ainsi inséparables d’une conception pessimiste et tragique de la vie. Grâce à des institutions morales, sociales et religieuses réglant la vie publique et privée des hommes, ne s’opposent-elles pas d’ailleurs de toutes leurs forces aux tendances du Moi à l’autonomie et à la désertion ? (…) La santé des moeurs n’est point un don gratuit, une faveur divine, elle est le rempart inlassablement réparé contre lequel les puissances de dissolution qui assiègent l’être humain viennent écraser leurs lames.

Dès lors, le pessimisme pratique s’avère infiniment plus moral et plus humain que tout optimisme."


Marcel de Corte, 1943. Bon week-end ! 


vendredi 16 mars 2018

"Je ne sais si le génie classique..."

Je suis désolé, je suis obligé de faire bref en ce moment, je vous laisse aujourd’hui avec cette question du grand Thibaudet : 

"Mais l’esprit critique et la puissance de construction artistique vont-ils ensemble ? Je crois bien qu’ils allaient ensemble chez les classiques, et je ne sais si le génie classique n’implique pas, nécessairement, un élément proportionné d’esprit critique."

Ce qui ouvre des perspectives - et rejoint par ailleurs une remarque que je me suis fait récemment : on a pu à bon droit, dans certaines affaires, évoquer la silhouette de Tartuffe. Il n’est peut-être pas alors inutile de rappeler que s’il y avait des Tartuffe au XVIIe siècle comme en d'autres siècles, c’est précisément le XVIIe siècle qui a immortalisé cette figure de l’hypocrite. Le Grand Siècle a été grand aussi dans la dénonciation des travers de l’homme et de la société (Nietzsche l’avait parfaitement compris). - Ici comme ailleurs, le conseil, basique au premier abord, de ne pas confondre le messager et la nouvelle qu’il apporte, ne doit pas être oublié. 

jeudi 15 mars 2018

La preuve par l'exemple que le féminisme peut aussi être logique...

Au rugby, on a coutume de dire que le muscle le plus important, c’est celui situé entre les deux oreilles. C’est aussi vrai en politique : 

"Un homme qui a déjà échappé à la prison après un vol avec violence, qui pendant son adolescence gloussait en voyant ses potes délinquants sortir du commissariat libres comme des papillons, pensez-vous vraiment qu’il écoutera les leçons de citoyenneté d’une intervenante associative ?

La focalisation sexuelle empêche de traiter le problème. Plus de 90% des agresseurs sont de sexe masculin mais ce ne sont pas « les hommes » le problème. La majorité des violences aux personnes est commise par une minorité de personnes. La majorité des agressions est commise sur des hommes. C’est une minorité de déviants identifiés, impunis, qui s’en prend aux femmes et aux hommes dans l’espace public. Vous savez, les fameux « connus des services de police » qui s’en sortent comme des fleurs presque à chaque fois. Le mec qui te traite de « grosse salope » ou de « kehba » quand tu ne réponds pas à son compliment, c’est aussi le mec qui met une balayette à ton petit frère de 14 ans pour lui piquer son portable.

On pourra m’objecter que les « racailles » ne sont pas les seuls auteurs de violences sexistes ou de harcèlement. C’est vrai. Il existe par exemple une part non-négligeable de harceleurs appartenant aux classes dominantes de la société, dont l’excellente maîtrise des normes sociales leur permet justement de harceler en toute impunité, de ruiner la réputation des plaignantes, de répondre pile comme il faut aux questions des policiers, de trouver de bons avocats. Mais l’existence de harceleurs cachés ne justifie en rien que l’on ferme les yeux sur la masse de harceleurs qui étalent leur agressivité envers les femmes de manière publique, assumée et bruyante.

La diversité des profils d’agresseurs et harceleurs ne signifie pas l’absence de profils. Distinguer divers profils d’agresseurs, de modes opératoires, de lieux, c’est précisément cela qui permet d’enrayer un phénomène sous ses formes les plus diverses. En matière de harcèlement de rue, le problème, ce sont les racailles, point.

On notera au passage que la phrase « Il n’y a pas d’agresseur-type! », les féministes institutionnelles la jettent toujours au visage de la femme qui se plaint d’avoir été agressée par des racailles, jamais à celle qui dénonce des violences commises par un « dominant ». Personne ne prétend qu’il existe un seul profil d’agresseur ou de harceleur, personne. Quand on martèle à une femme qu’« il n’y a pas d’agresseur-type », c’est pour la rappeler à l’ordre, c’est parce qu’on a la trouille qu’elle parle un peu trop librement.

Une femme victime d’agression subit systématiquement des pressions féministes à ne surtout pas décrire son agresseur : au nom du « pas d’amalgame » entre une agression et une communauté, elle est sommée de faire l’amalgame entre son agresseur et 100% des hommes. Toute femme coupable d’un vilain amalgame en public sera systématiquement rappelée à l’ordre. Celles qui amalgament l’ensemble des hommes à des porcs seront en revanche applaudies.

Pour vous donner une idée du niveau d’omerta féministe auquel nous sommes rendus, le collectif « Paye ta shneck », principale plateforme de témoignages de harcèlement de rue en France, censure systématiquement les témoignages de femmes contenant des mots tels que « kehba », « wallah », « kehba » ou « zebi » . La plupart des femmes qui me contactent pour me relater leur expérience du harcèlement de rue ou d’agressions ont peur d’être socialement rejetées si je publie leur témoignage. Elles sont des dizaines, alors que Bellica est un site très récent, qui reste assez confidentiel. Au même moment, les féministes institutionnelles parlent de « libérer la parole des femmes ». Tout le monde sait qui harcèle les femmes dans la rue, mais il n’y a pas de « Me Too » pour les victimes des racailles.

Les femmes victimes sont sommées de « ne pas stigmatiser » les racailles pour « ne pas en rajouter », puisque ces messieurs font partie des « dominés » de la société. C’est oublier que les rapports de domination varient selon les échelles géographiques. Un homme « dominé » à l’échelle de la société se retrouve, de facto, « dominant », quand il coince avec ses copains une nana dans un wagon de RER pour lui faire passer un sale quart d’heure. Contrairement à ce qu’affirme le credo féministe intersectionnel, une femme « non-racisée » de la classe moyenne diplômée n’est pas « une dominante » quand elle est encerclée par 5 mecs agressifs.

Le « harcèlement de rue » est principalement commis par des racailles et on ne rendra pas les rues sûres pour les femmes tant que l’on ne s’attaquera pas au phénomène racaille. Il suffit en large part d’appliquer les lois qui existent déjà et de cesser les expérimentations pédagogiques farfelues en matière « d’aménagements de peine », perçues par les racailles comme rien d’autre que des marques de faiblesse occidentale.

Les hommes sont les cibles majoritaires d’agressions mais les femmes sont davantage confrontées aux insultes et menaces au quotidien que les hommes. Autrement dit, statistiquement, les hommes sont davantage agressés, les femmes sont davantage renvoyées à la possibilité d’une agression. (…)

Lutter contre le harcèlement de rue passe nécessairement par la libération de la parole, le droit de décrire son agresseur sans craindre de subir les foudres du politiquement correct et par l’application réelle des peines envers les auteurs de violences, de manière à briser le sentiment d’impunité qui est la racine de leurs comportements déviants envers les femmes dans l’espace public.

En 2018, une femme harcelée dans la rue ou les transports subit un double harcèlement. Le harcèlement sur le moment, par une racaille, puis le lynchage social, dans son entourage ou sur les réseaux sociaux, si jamais elle ose décrire son agresseur un peu trop précisément.

Il est temps de mettre fin à ces menaces de mort sociale."

Solveig Mineo, ici : https://www.bellica.fr/harcelement-de-rue-les-racailles-sont-le-probleme-solveig-mineo/

Je me suis permis de souligner les passages dont j’ai le plus apprécié la logique et le bon sens. J’ai aussi souligné l’expression : "Tout le monde sait" (qui harcèle les femmes dans la rue), parce que c’est probablement là-dessus que l’auteur va se faire attaquer, tant les gauchistes sont ici des révisionnistes (ou négationnistes) dignes des avocats communistes lors du procès Kravchenko : il faudrait à leurs yeux que S. Mineo ait été témoin de toutes les agressions dont elle parle, pour avoir le droit d’avoir recours à une telle généralisation. Et encore ! L’invention du concept de « personne racisée », cette tentative illogique et pathétique, à la fois de nier l’appartenance de X ou Y à une ethnie et de reprocher à ceux qui ont des yeux pour voir que X est noir ou Y arabe de « construire » cette identité raciale (demandez pourtant à un arabe s’il ne se sent pas arabe…), l’invention de ce concept pourrait servir à nier l’évidence soulignée par Solveig Mineo. Ce n’est plus : « Cachez ce sein que je ne saurais voir », c’est « Cachez ce noir (ou cet arabe) que je ne saurais voir, d’autant qu’il n’est pas noir (ni arabe). » Et si la pauvre fille qui a été emmerdée l’a vu noir ou arabe, c’est encore sa faute. Etc.


Pour le reste, oui, il y a des harceleurs cachés, plus souvent blancs (ou suisses islamologues…), et ils ne valent pas mieux que les autres. Lutter contre les uns n'empêchent pas de lutter contre les autres, ce qui est gagné est gagné. - État d'esprit que l'on peut transposer dans d'autres problématiques : la France a des problèmes avec les immigrés, elle est attaquée par le capitalisme international. Si l'on attend d'avoir abattu celui-ci pour reconnaître que ceux-là posent des problèmes, celui-ci et ceux-là dormiront plus tranquilles que les Français - et les Françaises, dans le contexte, ajoutons cette précision...

mercredi 14 mars 2018

Faust.

"L'excrément des villes c'est l'amour de l'or
Le désir de la jeunesse est l'appétit du cimetière."

P.-J. Jouve. A force de voir que des gens aussi estimables que J. Clair et J. Starobinski l'apprécient, je suis allé y faire un tour, je reste plutôt sur ma faim à l'heure actuelle. Mais j'aime bien ces deux vers.

Problème technique hier, l'angoisse.

"La mort a écouté le prêche inconsistant
la morale a prêché emporté par le vent
le prêche de morale écouté par la mort
c’est la mort qui écoute et la mort qui entend
l’autre parle sans cesse et sa voix ne demeure
que l’espace d’un souffle emporté par le vent
qui écoute et entend muette et reniflant
l’odeur de ce bon prêche au-dessus de mon temps
c’est mon prêche et ma mort ma morale et mon temps 
mon odeur encrassée odeur d’agonisant
car chaque jour je meurs et je prie inconstant

la mort de ma morale emportée à tout vent."

R. Queneau. 

lundi 12 mars 2018





Je ne suis pas et n’ai aucune prétention à être critique littéraire. Les textes que je cite en ce moment et qui relèvent plus ou moins de ce domaine, je ne le fais pas par souci d’originalité. Il se trouve que j’ai de plus en plus besoin de retrouver - musique, peinture, cinéma, et donc, littérature - un peu de beauté et de précision. Ce n’est pas tant fuir la laideur et la vulgarité contemporaines, que de sortir la tête de l’eau et respirer de temps à autre. 

Je fais cette petit mise au point avant de vous reproduire un texte de Jean Starobinski, écrit en 2000, qui n’est pas bouleversant en tant que tel, mais dont j’ai bien aimé les fermes leçons de morale. Ces lignes sont consacrées à l’un de ces anciens professeurs (de 1939 à 1942), Marcel Raymond, dont je ne crois pas avoir jamais entendu parler : 

"Marcel Raymond ne voulait rien laisser au hasard, mais sans rien figer dans une écriture trop chevillée. Nous savons maintenant, par les écrits autobiographiques, combien les cours et leur préparation lui ont coûté. Notée de façon aérée sur des feuilles de petit format, la leçon était méditée, construite, musicale. Elle naissait pour nous, devant nous. Son ouverture consistait généralement dans le rappel de quelques faits précis. A partir de là, un parcours était entrepris, qui suivait la trace d’une aventure intellectuelle et qui nous faisait écouter des textes, pour aboutir finalement à des interrogations dont nous devenions partie prenante. Par élargissements successifs, la leçon progressait vers un moment, culminant mais non conclusif, où se nouaient les motifs apparus au fil de l’heure. 

Ce grand art de la leçon ne cherchait pas à se mettre en valeur pour lui-même. L’ex cathedra n’était pas utilisé à des fins personnelles. Par égard d’abord pour notre ignorance et pour notre besoin d’information, Marcel Raymond prenait toujours le temps de mettre en place les données indispensables ; il n’oubliait pas les circonstances historiques, qui sont une condition d’intelligibilité. Il savait être sobre, précis, rapide dans ces moments introductifs. 


Ces attentions envers les écoutants allaient de pair avec le respect des auteurs étudiés. Marcel Raymond parlait d’un écrivain comme s’il était présent en personne dans l’auditoire. C’était exclure d’avance le ton de supériorité - privilège du dernier venu - qui a toujours été la grande tentation du métier professoral. L’égard envers les auteurs absents était donc pour Raymond un préalable absolu. De fait, il choisissait ses sujets en fonction de la possibilité d’un intérêt dépassant la seule connaissance. La littérature était interrogée comme si elle pouvait subvenir à nos manques et à nos attentes. Quant à l’évaluation esthétique et au jugement moral, Marcel Raymond ne renonçait jamais à marquer ses exigences, mais avec des précautions rhétoriques qu’il avouait lui-même. Dans l’économie de sa parole, il lui suffisait d’un adjectif ou d’une expression dubitative pour signaler un désaccord. Sa façon discrète d’exprimer des réserves avait plus d’acuité que maints discours accusateurs. En écoutant ses leçons, pas plus qu’on ne se sentait au laboratoire l’on ne se transportait au tribunal. La fondamentale retenue de Marcel Raymond contrastait avec d’autres styles universitaires qui avaient cours dès son époque : il ne cherchait à séduire ni par le tranchant des systèmes scientifiques, ni par l’émoustillement devant les détails de la vie intime, ni par la verve entraînante et l’abattage qui brûle les planches (et qui devient si facilement comique). Il ne faisait pas montre d’une ferveur qui eût fait valoir sa personne en lieu et place des textes dont il nous parlait. Ce qui dominait chez lui était ce composé de sensibilité et d’intelligence qu’on appelle le tact. (…) Au passage, les bifurcations des problèmes, les développements collatéraux était indiqués brièvement. Raymond savait placer les butées interrogatives, pour faire sentir que le sujet n’était pas épuisé, que tout n’acceptait pas d’être mis en lumière, étalé au grand jour. Il faisait sentir le mystère sans parler constamment de mystère."












dimanche 11 mars 2018

Qu'est-ce qu'il faut pour être heureux ?

Guitry, encore. Avec Arletty, s'il vous plaît (et Reynaldo Hahn, qui ne chante pas très bien, tant pis). J'ai peut-être déjà évoqué cette chanson dans le passé, mais comme je lorgne du côté de Guitry en ce moment et que rien n'interdit un peu de gaieté - au contraire d'ailleurs... Bon dimanche !


samedi 10 mars 2018

Ne travaillez jamais. Guitry situationniste.

"Les Souvenirs de M. Sacha Guitry ont ramené l’attention sur cette génération des Allais, des Renard, des Capus et des Tristan [Bernard], qui l’entouraient au Breuil, dans la propriété paternelle, quand il avait dix à vingt ans, pendant les vacances dirais-je, si Sacha Guitry n’avait pas toujours été en vacances."

Thibaudet avait le sens de l’incipit. Bon samedi !

vendredi 9 mars 2018

Hommage à #MeToo : "J’ai été violé !"

Hommage tardif certes, je n’avais pas attaché plus d’importance qu’elle ne méritait à la journée des droits des femmes, c’est-à-dire que je m’en foutais - lorsqu’hier soir ma fille, ma fierté, m’a (cassé les couilles et) rappelé à l’ordre, choquée par mon indifférence, qu’elle supposait machiste. Je lui ai bravement répliqué qu’il me semblait plus important de célébrer chaque jour l’existence de la femme, ce que mon fils, ma fierté, a corroboré à sa littéraire manière : "Wesh, on se ferait chier sans elles." (Je sais, mon fils, ma fierté, dit "Wesh". La vie rend modeste, chantait Dominique A.).

Ma fille s’est tue, ce qui n’est pas courant (et ne durera pas). J’ai pensé à vous communiquer ces passionnantes réflexions. Elles me semblent mériter le grano salis de Guitry, ce superbe extrait d’Assassins et voleurs, la séquence dont il s’agit débutant à 49’30". Vous pouvez bien sûr regarder le film en entier. 


jeudi 8 mars 2018

1931. Thibaudet écrit.

Les idées qui suivent ne sont pas particulièrement brillantes. Justes, mais pas particulièrement brillantes. J’aime surtout la facilité et la clarté du style : 


"L’éducation sentimentale a été une oeuvre d’une fécondité extraordinaire. Nous allons dans quelques mois fêter son soixantième anniversaire (…), et nous nous rendons compte qu’aujourd’hui encore toute une part du roman français continue à en vivre, à passer par la trouée qu’a faite Flaubert. Cependant [lors de sa publication], elle échoua, et auprès de la critique et auprès du public. Elle échoua parce que le roman de la vie manquée parut à la critique et au public le roman manqué de la vie. (…) L’éducation sentimentale, mise si haut par les lettrés, les écrivains, et qui est un roman des connaisseurs à peu près comme Britannicus est la pièce des connaisseurs, l’Éducation ne saurait être comprise (…) si on l’isole de la vie et de la génération de Flaubert. Tous les personnages (du Camp nous dit qu’il les a bien connus) sont des personnages vrais, arrangés par Flaubert et retravaillés sur le plan du roman. L’Éducation, roman de la vie manquée, est aussi le roman de la vie telle que Flaubert l’eût manquée, lui le premier, s’il n’eût été artiste."

mercredi 7 mars 2018

1856. Barbey râle.

Voilà un auteur que je n’ai pas lu depuis… plus de la moitié de ma vie - personne ne rajeunit ! - Bref, notre ami se plaint des journaputes de l’époque, qu’ils soient haut ou pas haut placés, rien de nouveau sous le soleil : 

"C’est à croire parfois que les gens qui devraient grandement servir l’Empereur le trahissent ! Du moins, ont-ils peur de tout ce qui est idée d’autorité et refusent-ils de tirer sur ses plus grands ennemis. La Guéronnière, avec son caractère de colle-à-bouche, craint de toucher à tout, et s’imagine que la politique est de glisser entre les difficultés, au lieu de les attaquer de front, comme un taureau, par les cornes. Ah ! Je suis dans un fier troupeau de Jean-Foutres, mon cher ami ! (…) Oui, ce sont les seigneurs Baise-culs de la politique ! Rabelais ne les avait pas devinés. Dès que je hausse le ton, les voilà aux champs. Tout est perdu. Je ne puis carrer une idée ni attaquer personne."

mardi 6 mars 2018

Feuilletant un recueil de textes de Thibaudet, je tombe sur ces lignes issues d’une recension du livre de Bernanos sur Drumont, La Grande Peur des bien-pensants, lignes qui rejoignent quelques réflexions éparses que je me faisais à part moi sur les paradoxes de la condition de pamphlétaire - j'insiste au passage sur la notion de paradoxe, dont certains estiment qu'elle est centrale dans le catholicisme :  


Les polémistes "sont exemptés de justice, comme le militaire pendant le combat. Et exemptés d’humanité. Il faut des polémistes à la vie politique, un aiguillon au boeuf du char de l’État - et Drumont comme Veuillot ont pensé que le chariot de l’Église avait parfois le même besoin. Et il en faut à la littérature, il en faut pour la littérature. Ce n’est pas seulement, ce n’est pas surtout d’avoir été baptisée par l’eau claire du Discours de la méthode qu’est forte la prose classique, c’est d’avoir eu sur les lèvres le vin nerveux et la gousse d’ail des Provinciales. Il est d’ailleurs certain qu’un bon polémiste n’est pas un polémiste bon, qu’il doit mettre un voile sur la troisième des vertus théologales, ressembler à cette dame dont parle Saint-Simon, qui avait supprimé de son Pater quotidien la phrase sur le pardon des injures, et que pour un écrivain chrétien, c’est là, en droit, une situation délicate et gênante. Mais en fait, les polémistes les plus violents, les plus truculents, ont été au XIXe siècle des polémistes catholiques, les Veuillot, les Barbey, les Bloy, les Drumont. Et Rome ne saurait empêcher L’Action française d’emboiter encore le pas."

lundi 5 mars 2018

Service minimum.

"Le désespoir le plus amer d'une vie consiste à ne s'être pas accompli, à n'avoir pas été la hauteur de soi-même." (Jünger)

dimanche 4 mars 2018

Alphonse Allais social-traître...

"A peine au sortir de l’enfance, et même un peu avant, il avait mis en pratique ses théories sur la méprisabilité du travail. Sa devise favorite était : On n’est pas des boeufs. Son programme : Rien faire et laisser dire

La manifestation de ces farouches révolutionnaires qui réclamaient huit heures de travail par jour lui arracha de doux sourires, et il félicita de tout son coeur les gardiens de la paix (sic) qui assommèrent ces formidables idiots."

samedi 3 mars 2018

Utile distinction.

"Les Français sont peut-être le peuple le plus spirituel. Ils ne sont certainement pas le peuple le plus intelligent."

Léautaud. - Cela fait longtemps que je pense, d'une part, que les Anglais sont plus intelligents que nous, d'autre part, que cela se manifeste notamment par la façon dont ils acceptent de nous laisser continuer de croire que nous sommes plus intelligents qu'eux. (En rugby, c'est très net.)

vendredi 2 mars 2018

"On dompte les peuples comme les lions..."

"La littérature pornographique va bien à un Bas-Empire, elle le sert. Je me suis rappelé un couplet intercalé dans Le Juif Errant par M. Mocquard, que j'ai entendu l'autre soir à l'Ambigu : le sens en était qu'il ne fallait plus faire de politique, mais s'amuser, gaudrioler et jouir. 

On dompte les peuples comme les lions, par la masturbation."

(Les Frères Goncourt, 1860.)

jeudi 1 mars 2018

Approche progressive de Jünger.

Julien Hervier, préface au Travailleur, ouvrage paru en 1932 : 

"Son absence de racisme l’entraîne même à penser que les Occidentaux ne disposent dans le monde de la technique d’aucune supériorité innée : qu’ils s’attendent encore à bien des surprises de la part des autres peuples. 

Sa description de l’instauration imminente d’un monde dur et sans pitié n’est... bien souvent qu’un accès de lucidité. Il note ainsi la rigueur impitoyable pour les petits peuples de la formation des grands empires, ou l’extension probable de la pratique des transferts de population. En politique intérieure, il attire l’attention sur la façon dont l’envahissement de l’État va s’accroître avec la diffusion du confort et les innovations techniques : le besoin d’électricité, de téléphone, la possession d’une voiture deviennent autant de servitudes qui soumettent à l’État, possesseur primaire des instruments de puissance technique. Et l’arrivée légale d’Hitler au pouvoir prouve bien qu’il n’est pas besoin d’être antidémocrate pour envisager que les masses puissent spontanément voter dans un sens antidémocratique."